Comment résoudre l’épineux problème
des cotisations retraite des microentrepreneurs ? Les avis du Sénat et de la Fédération nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (FNAE) divergent.
Petit rappel de la situation : les cotisations à la retraite des autoentrepreneurs ne sont pas automatiques, ainsi, pour cotiser à la retraite, les autoentrepreneurs doivent déclarer un revenu annuel minimal.
Ce revenu minimal n’est pas le même selon les catégories auxquelles ils sont rattachés : la vente de marchandises (BIC) ; les prestations de services commerciales et artisanales (BIC) ; les activités libérales (BNC).
Mais pour tous, le couperet est le même : s’ils n’atteignent pas le chiffre minimal, ils ne cotisent pas à la retraite, tout simplement !
Ou alors, ils le font dans un autre cadre : en effet, certains ont leur activité d’autoentrepreneur en complément d’une activité salariée, pour laquelle ils cotisent cette fois.
Reste que cotiser à la retraite pour les deux activités (quand on gagne suffisamment en tant qu'autoentrepreneur) ne permet pas d’engranger des trimestres supplémentaires : quand on est à la fois salarié et auto-entrepreneur, on ne peut valider plus de 4 trimestres par an.
La "bombe à retardement" des autoentrepreneurs pauvres qui ne cotisent pas à la retraite
Mais tous les autoentrepreneurs n’ont pas d’autre activité en complément, et c’est ce qui inquiète les sénateurs. Certains, déjà pauvres et précaires pendant cette partie de leur vie active, risquent de devoir survivre, une fois âgés, grâce l’allocation de solidarité aux personnes âgées.
« La question, c'est d'éviter que des travailleurs pauvres deviennent des retraités pauvres », a expliqué le sénateur socialiste de la Nièvre, Patrick Joly, à l'occasion des débats sur la réforme des retraites, rapporte le quotidien Les Echos.
« Dans les conditions actuelles, les nouvelles formes de travail (plateformes numériques et autres…) feront qu'à terme des centaines de milliers de personnes seront au minimum vieillesse », estiment les socialistes.
C’est pour désamorcer cette « bombe à retardement » qu’ils cherchent une solution. Le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal a accepté leurs amendements qui demandent un rapport sur la question.
Une cotisation retraite pour tous qui baisserait les revenus des autoentrepreneurs
Ce n’est pas la première fois que les sénateurs proposent de mettre en place cette cotisation retraite minimale. C’est même « la troisième fois en 13 ans », souligne la Fédération nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (FNEA), dans un communiqué de presse.
Le problème, c’est que cette cotisation retraite systématique baisserait d’autant plus les revenus des autoentrepreneurs pauvres, qui, déjà, versent 21,1 ou 21,2 % de cotisations sociales à l’Urssaf (12,3 % pour les activités d’achat/vente de marchandises (BIC), et de prestations d'hébergement (BIC)).
Sans compter que, dans leurs estimations personnelles de revenus, ils doivent aussi déduire 10 % de chiffres d’affaires en plus s’ils veulent se verser un équivalent de congés payés. C’est d’emblée plus de 30 % qu’ils doivent aujourd'hui retirer dans leurs estimations de revenu mensuel (sans prendre en compte le loyer du local, les factures d’électricité, les frais d’essence, la cotisation CFE, la mutuelle, l’abonnement Internet…)
D’où l’opposition de la Fédération nationale des autoentrepreneurs (FNAE). « Une telle mesure fragiliserait les autoentreprises et aurait pour conséquence de renvoyer les créateurs vers le Pôle Emploi et ou vers l’économie souterraine, » souligne Grégoire Leclercq, le président de la fédération.
C’est aussi ce qu’estime Gabriel Attal : « On risque de renvoyer vers la non-déclaration certaines activités qui aujourd'hui sont déclarées par le régime de microentreprise », a-t-il déclaré.
La FNAE propose une autre solution : que les autoentrepreneurs qui le souhaitent puissent payer en fin d’année des cotisations supplémentaires validant les trimestres manquants.
Autoentrepreneurs : les services à la personne peu rémunérateurs
Au second trimestre 2022, la moyenne de chiffre d’affaires pour un autoentrepreneur a été de 4 907 euros, selon l’URSSAF. Il varie beaucoup selon les secteurs.
Les activités de poste et de courrier sont les moins rémunératrices : 1 282 euros en moyenne.
Les activités les plus rémunératrices sont les professions intellectuelles : les activités financières et d'assurance génèrent en moyenne trimestrielle 9.029 euros ; les activités immobilières, 8.615 euros.
Les entrepreneurs dans les services à la personne, au nombre de 8 440, sont aussi en deçà de la moyenne : par exemple 3 271 euros pour la coiffure et les soins du corps, 3 327 euros pour les activités sportives.
Voir l’article d’Aladom : Quelques chiffres sur les services à la personne
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Pour calculer si un trimestre est validé, ce n’est pas le simple chiffre d’affaires qui est pris en compte.
Les trimestres sont validés selon le revenu annuel, qui se calcule ainsi : Revenu annuel = chiffre d'affaires encaissé - abattement forfaitaire
Voir l'explication du Portail de l'autoentrepreneur.
Or, cet abattement forfaitaire n’est pas le même selon les activités des autoentrepreneurs : il est de 71 % pour les activités commerciales, de 50 % pour les prestations de services commerciale et artisanale, et seulement de 34 % pour les activités libérale.
Enfin, le calcul n’est pas non plus le même selon la caisse de retraite dont on dépend (Cipav et régime général ont des mode de calcul différents pour la pension de retraite).
Pour aller plus loin :
Voir l’article des Echos : Retraites des microentrepreneurs : les sénateurs alertent sur une « bombe à retardement »
Voir le communiqué de presse de la Fédération nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (FNAE) : Retraite : les autoentrepreneurs opposés à une cotisation minimale