Reportage en EHPAD et sur le maintien à domicile
Aujourd’hui, en France un million et demi d’hommes et de femmes sont considérés comme dépendants et il y a 600 000 personnes en France qui vivent en EHPAD. 9 français sur 10 veulent bien vieillir chez eux.
Dimanche 29 janvier 2023, Zone Interdite présenté par Ophélie Meunier était consacré aux promesses et aux réalités de différentes prises en charge des personnes âgées.
Le magazine a rassemblé près de 2 millions de Français, soit 9,9% de part d’audience.
On y voit en caméra cachée le traitement de Jean, nonagénaire en EHPAD. Souffrant de dénutrition et de chutes avec du personnel qui n'a pas le temps de s'occuper des résidents. Le principal problème qui ressort de ce reportage est le manque de personnel, de moyens et de matériel.
Les établissements sont en sous effectif et les salariés se sentent abandonnés. Les soignants se sentent mal payés et mal considérés.
Le reportage de Zone Interdite est à voir en replay.
Il y a normalement 3 soignants pour 10 résidents mais en raison du manque de personnel, on trouve souvent 1 soigant pour 10 et ils n'ont pas le temps de s'occuper des résidents. De plus de nombreux vacataires interviennent pour palier au manque de personnel.
Quand les salariés n'ont pas le temps ils se limitent à ce qu'on appelle "Tête Main Cul" : ne nettoyer que le visage, les mains et les parties intimes.
Dotation de 1700 € par résident par mois
Selon le reportage des complément alimentaires sont donnés aux résidents pour palier le manque de viande. Les compléments entrent dans la dotation soins financée à 100% par l'état.
L'état finance via l'ARS une partie de la dépendance : 1700 € par résident et par mois. Ceci finance les compléments alimentaires, le matériel médical, les protections, les médicaments et le salaire des infirmier, des médecins coordinateurs, des aides soignants et des psychologues.
Les clients paient le complément : l'hôtellerie, le loyer de la chambre, la restauration et le personnel administratif.
800 000 personnes dépendantes vivent à domicile
Le reportage est aussi consacré au maintien à domicile. On y voit le quotidien d'Alice qui a choisi de rester à son domicile et à qui tous les matins des infirmières font la toilette et l'aident à se lever. Alice dispose de 6 passages par jour : petit déjeuner, toilette et transfert au fauteuil, à midi passage pour repas, entre 14 et 16h passage pour le ménage, repas du soir, mise au lit.
On voit aussi à travers ce reportage le quotidien des aides à domicile avec une journée fractionnée entre les interventions...
Alice dispose de l'APA pour 10 h de services par semaine. Le reportage indique que 18 personnes différentes peuvent intervenir par mois. Le reste à charge est de 200 € par mois.
Une scène du reportage montre un jeune aide à domicile qui doit faire face au refus de la personne âgée à se laver. Il arrive à garder son sang froid et explique que ces soins sont indispensables pour éviter le risque d'escarres.
Le reportage met en avant un numéro pour signaler toute maltraitance, le 3977 : 40000 appels en 2022.
Les auxiliaires de vie sont en première ligne et les accidents de travail sont nombreux. Le reportage montre qu'une personne non diplômée a pu se faire recruter. Il manque en effet des auxiliaires de vie formées et les salaires ne sont pas toujours attractifs.
Réactions suite au reportage de Zone Interdite
Le reportage se focalise sur certains cas et montre surtout la difficulté des acteurs du terrain qui n'arrivent pas à recruter.
Ce reportage a entrainé de nombreuses réactions que nous relayons :
Réaction de la Fédésap
Voici la réaction de la Fédésap à ce reportage :
" Alors que le sujet de l’Autonomie des personnes âgées et en situation de handicap est désormais l’un des enjeux majeurs pour l’avenir de notre société, une émission diffusée ce dimanche soir tente de jeter l’opprobre sur le secteur de l’aide à domicile. Ce même secteur qui a pourtant surmonté une crise sanitaire d’ampleur lors de laquelle les quelques 400 000 professionnels du Domicile n’ont jamais failli à leurs obligations sans aucune reconnaissance publique.
La Fédésap, 1ère fédération du secteur regroupant des entreprises comme des associations, rappelle que depuis plus de 5 ans, elle a alerté les pouvoirs publics sur l’absence de vision politique sur le champ de l’Autonomie et sur le manque de moyens qui en résulte.
À l’impossible, nul n’est tenu !
Certaines situations (bénévolat déguisé, fraude des heures d’intervention…) de ce reportage sont totalement inexcusables et contraires à l’éthique à laquelle aspire la grande majorité des professionnels et que défend la Fédésap. Nous regrettons qu’il ne soit pas fait mention des principales revendications du secteur : une meilleure prise en charge, plus de capacité d’accompagnement de la personne, plus de transparence et de contrôle des tutelles notamment.
Malgré nos alertes continues, les politiques ont continué à fermer les yeux face à la situation d’un secteur en crise permanente. En continuant à investir massivement sur les EHPAD au détriment du « virage domiciliaire », les responsables politiques ont fait délibérément le choix de sacrifier le Domicile.
Comment recruter quand depuis plus de 15 ans, le financement d’un Assistant de vie en Services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad) est valorisé 50% de moins qu’un aide-soignant en Service de soins infirmiers à domicile (SSIAD) à niveau de diplôme identique (aujourd’hui encore 23€ contre 35€) ? Comment assurer la nécessaire continuité des interventions quand nous n’avons pas de personnel ? Comment résoudre l’équation de l’exigence du service, de la qualité de vie au travail requise et des diplômes avec un financement qui contraint les rémunérations à un niveau trop proche du SMIC ? Autant de sujets qui ne sont pas mis en avant dans cette émission.
Des organisations très loin du CAC 40
À l’inverse du marché des EHPAD, il nous semble bon de rappeler que le tissu économique des Saad est principalement constitué d’associations à but non lucratif ou de TPE et PME très majoritairement détenues par leurs fondateurs. Il n’y a pas de groupes côtés parmi nos adhérents. Nos adhérents sont constitués d’entrepreneurs sociaux qui, forts de leur impact social, ont fait le choix de ce métier par vocation et le souhait de permettre aux personnes fragilisées de bien vieillir chez elles.
Une mesure choc indispensable
La Fédésap appelle à une augmentation immédiate du tarif horaire national socle à 30 euros de l’APA et de la PCH, les principales allocations permettant aux personnes âgées et handicapées de faire le choix de vivre et vieillir chez elles en bonne santé. Sans réaction, le Gouvernement s’expose à de nouveaux scandales. Nous rappelons l’urgence et la précarité dans lesquelles sont plongés nos professionnels du fait de l’absence de stratégie politique sur le champ du domicile. Le « virage domiciliaire » en restant sous-financé devient un véritable serpent de mer.
Si le Gouvernement veut que nous puissions surmonter le tsunami gris et répondre à l’aspiration des citoyens de rester chez eux, il nous faut de la considération et des moyens. Des paroles certes mais surtout des actes. "
Réaction du site AgeVillage
Le site d'information des seniors et des aidants AgeVillage, donne trois pistes d'explications à ces scandales auxquels le ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées, Jean-Christophe Combe s'est engagé à remédier :
- dépasser les difficultés à dénoncer l’inacceptable
- le manque de moyens, de professionnels vers un taux d’encadrement opposable ?
- clarifier le financement des Ehpad, leur tarification et moraliser les pratiques
La réaction d'Orpéa au reportage de Zone Interdite
A la fin du reportage, la parole est donnée à Laurent Guillot, le patron d'Orpéa arrivé il y a 6 mois qui donnait ses réactions.
Laurent Guillot admet qu'il y a encore un travail à faire et Orpéa a prévu de recruter 800 personnes par mois. Le taux d'encadrement a augmenté de 10 % dans les EHPADs.
Il est important pour lui de recruter et de retenir les salariés car le turnover est trop important.
Le budget repas devrait augmenter de 30 % et les salaires sont en cours de revalorisation.
Orpéa se donne l'année 2023 pour atteindre les objectifs qu'il s'est fixé.
Réaction de la FESP
La Fédération des Entreprises de Services à la Personne a réagit sur un post LinkedIn :
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📢 Les services de maintien à domicile : non cela ne se résume pas Zone Interdite, GROUPE M6
Non ce n’est pas ça !!!
🎯 C’est un secteur où les acteurs sont soumis à des autorisations et un cahier des charges stricte qui nous oblige à une politique de ressource humaine exigeante !
🎯 C’est un secteur ou les auxiliaires de vie sont diplômées ou ont de l’expérience !
🎯 Ce sont des entreprises engagées dans la gouvernance, dans la recherche de qualité !
La Fédération du service aux particuliers (FESP)s’engage pour que ses adhérents et les salariés soient fiers de travailler dans ce secteur et ils le peuvent !!
car #noncenestpasça !!!
Suite à la diffusion de ce reportage, la Fédération du service aux particuliers tenait à réagir en donnant la parole à des adhérents.
Maxence Hotte (président de FEEADOM), Rémi Domenjoud (DG de Agidom Services) et Loïc Gobé (DG de HELPI) nous font part de leur réaction à la suite de la diffusion du doc et témoignent de leur expérience managériale et de leur exigence de qualité de service envers les bénéficiaires de SAP dans cette vidéo :
La Fesp assure son soutien à tous ses adhérents ainsi qu'à l'ensemble des acteurs du secteur @collectifinvisible
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La réaction de Jean Christophe COMBE
Cette réaction ne fait pas référence directement au reportage de Zone Interdite, mais mercredi 1er février 2023, devant le Sénat, Jean Christophe COMBE répondait à une question de Jean Michel ARNAUD sur la prise du contrôle d'Orpéa par la Caisse des dépôts et Consignations et il indiquait :
Plus les vagues sont hautes, plus on trouve de surfeurs jouant dessus par plaisir. Pour les médias c’est identique…
Informé, comme toutes les rédactions de la sortie des « Fossoyeurs » version 2, M6 a vite saisie l’opportunité d’un joli reportage sur le sujet.
Le jeudi 16 janvier nous recevions une invitation à une Visioconférence pour le 24 janvier en présence de la réalisatrice et productrice ainsi que des témoins du reportage. Nous y répondons favorablement en y joignant la lettre ouverte que nous avions adressée à Mme Hédon La Défendeure des droits quelques jours auparavant. Erreur car le contenu de celle-ci ne devait pas aller dans le sens souhaité. Plus jamais contacté, nous n’avons donc pas eu droit à la parole.
Cela donne un bel exemple de déontologie et pluralité des médias actuels tout puissant.
Alors il était inutile de mettre une caméra cachée lors du comité de rédaction pour comprendre l’axe choisi pour le reportage. Le crash recherché était tellement semblable aux multiples épisodes d’Elise Lucet, qu’elle serait en droit de demander des Royalties pour plagiat, du moins c’est ce que nous lui conseillerions.
La volonté d’accabler Orpea, cible facile était évidente car ce qui est montré pour choquer, pourrait l’être dans n’importe quel autre établissement qu’il soit privé, public ou associatif.
La règle des trois catégories est valable pour les Ehpad comme pour toute société. La première fait plus de ce qu’elle doit, la deuxième fait ce qu’elle doit et la troisième ne le fait pas. La production du reportage ne le découvre pas, elle le sait, en joue et s’en délecte en nous montrant un personnel qui appartient à la dernière catégorie. Pour certains et certaines leur activité professionnelle est uniquement alimentaire et n’auront jamais l’humanité indispensable à leur tâche. Cela quel que soit le ratio mis en place dans une résidence.
MDRS soutient et partage un profond respect pour les deux premières. Elles, les plus nombreuses, ne méritent absolument pas le nouveau slogan à la mode dénommé « maltraitance systémique » qui fait saliver tant de communicants aux multiples intérêts.
David Jacquet Directeur de MDRS