● Mise à jour : Victoire pour les défenseurs de la solidarité locale.
Face à la mobilisation massive orchestrée par l’Unccas et ses partenaires, le gouvernement a annoncé qu’il renonçait à rendre les CCAS facultatifs. Prévue initialement dans le cadre du « Roquelaure de la simplification », cette mesure devait faire l’objet d’un amendement au Sénat. Grâce à l’engagement de 15 000 CCAS, des unions départementales, d’associations d’élus, de parlementaires et d’acteurs de la solidarité comme le Secours Catholique, l’Uniopss ou Les Petits frères des pauvres, le message est passé : les CCAS sont indispensables et doivent rester obligatoires. Une décision saluée par l’Unccas, qui souligne qu’il s’agit là d’un signal fort en faveur de l’action sociale de proximité, et d’une reconnaissance du rôle essentiel joué par ces structures sur tout le territoire.

⬇ Retour sur les enjeux de cette mobilisation et les raisons pour lesquelles la proposition initiale avait soulevé une telle vague d’opposition, dans la suite de cet article.

Depuis leur création, les centres communaux d’action sociale (CCAS) sont devenus des maillons essentiels de la solidarité locale. Ces établissements publics, présents dans la quasi-totalité des communes de France, accompagnent au quotidien les personnes âgées, en situation de handicap, isolées ou en grande précarité. Pourtant, une réforme en discussion pourrait bouleverser leur existence même. Le gouvernement envisage de rendre facultative l’existence des CCAS, jusqu’ici obligatoires dans les communes de plus de 1 500 habitants. Une décision qui fait bondir l’Unccas, le réseau national des CCAS et CIAS. 

Une simplification qui inquiète le terrain 

Le 27 mai 2025, l’Unccas a publié un communiqué de presse sans équivoque : « Rendre les CCAS facultatifs : pour l’Unccas, c’est toujours non ! » Dans ce texte, les élus locaux dénoncent une réforme présentée comme une mesure de simplification administrative, mais qui pourrait affaiblir gravement la solidarité de proximité. Selon l’Union, cette "fausse bonne idée" risque de désorienter les maires en leur laissant croire à des économies budgétaires illusoires, tout en fragilisant les réponses sociales de terrain. 

Alors que les CCAS sont régulièrement mobilisés dans les dispositifs impulsés par l’État (Points conseil budget, France services, Service public de l’autonomie, plan Mieux manger, etc.), cette mesure est perçue comme un contre-sens politique. D’autant plus qu’aucun maire consulté par l’Unccas ne soutiendrait à ce jour la suppression de leur CCAS local. 

Des missions vitales, souvent invisibles 

Les CCAS sont aussi à l'origine de nombreuses initiatives sociales innovantes. Certaines communes développent par exemple des projets comme les colonies de vacances pour seniors, qui rompent l'isolement tout en favorisant le bien-être des aînés. D’autres soutiennent des projets culturels à visée intergénérationnelle, comme la pièce "Adopte un jeune.com", vecteur d’échanges et de liens entre générations. 

Concrètement, un CCAS ou CIAS (intercommunal) agit dans l’ombre mais avec un impact direct sur la vie de millions de personnes. Ils réalisent l’analyse des besoins sociaux (ABS) à l’échelle locale, facilitent l’accès aux droits sociaux, gèrent les aides d’urgence, et tiennent à jour le registre des personnes vulnérables. Un outil crucial lors d’événements comme la canicule ou les épisodes de grand froid. 

À cela s’ajoutent les aides alimentaires, l’organisation de portages de repas, le soutien aux familles ou encore la coordination avec les associations locales. Le CCAS, c’est aussi souvent le seul guichet accessible dans les petites communes, là où les administrations sont parfois absentes ou saturées. 

Besoin d'aide à domicile ?

Une mesure qui creuse les inégalités territoriales 

Par ailleurs, les CCAS sont au cœur de la mise en place du Service Public Départemental de l’Autonomie  (SPDA), un guichet unique visant à simplifier l’accès aux aides pour les personnes âgées et en situation de handicap. Fragiliser ces structures, c’est aussi compromettre la bonne articulation entre les dispositifs locaux et départementaux. 

Selon un article publié sur UNCCAS.org, la réforme budgétaire 2025 pourrait non seulement affaiblir ces structures, mais aussi renforcer les inégalités entre territoires. Les grandes métropoles auront toujours les moyens de maintenir une politique sociale forte, même sans CCAS formel. Mais dans les communes rurales ou périurbaines, cette suppression pourrait entraîner une baisse des services rendus aux habitants les plus fragiles. 

Le risque ? Une "municipalisation" hasardeuse de l’action sociale, où chaque commune déciderait, à sa manière, d’assurer ou non certaines missions, sans cadre homogène ni obligation de résultat. Une dérive que redoute l’Unccas, car elle mettrait en péril la continuité et la cohérence des politiques sociales locales. 

Vers une désinstitutionnalisation de la solidarité ? 

Pour de nombreux élus et professionnels du secteur, ce projet de suppression s’inscrit dans une logique de désinstitutionnalisation de l’action sociale. Sous couvert d’autonomie locale, le gouvernement transférerait la responsabilité de la solidarité aux communes, sans en garantir ni les moyens, ni la compétence. 

Dans un contexte de vieillissement de la population, d’aggravation de la précarité et de crises climatiques répétées, affaiblir les CCAS semble aller à contre-courant des besoins de la société. Les élus locaux, premiers témoins des difficultés sociales sur leur territoire, alertent : ce n’est pas le moment de démanteler ce qui fonctionne encore. 

Un appel à la mobilisation 

Les CCAS assurent également un rôle de proximité dans l’accès aux aides pour les personnes handicapées, en orientant les usagers vers les bons interlocuteurs et en facilitant les démarches souvent complexes. Ce travail de fond, silencieux mais indispensable, garantit que personne ne reste sans réponse face à des situations de vulnérabilité. 

Les inquiétudes ne se limitent pas à Paris. Dans le Tarn, le maire d’une commune de 2 000 habitants témoigne : « Sans notre CCAS, je ne vois pas comment nous pourrions répondre aux besoins des familles isolées et des personnes âgées. Ce n’est pas un luxe, c’est un lien vital. » 

À Lille, une responsable associative spécialisée dans l’aide alimentaire explique : « Le CCAS, c’est notre partenaire principal. Il coordonne, il alerte, il oriente. Sans lui, on perdrait une part essentielle de notre efficacité. » 

Même son de cloche en Dordogne, où un agent territorial travaillant en lien avec un CIAS confie anonymement : « Quand il y a une urgence sociale, c’est vers nous que les habitants se tournent. Supprimer ces structures, c’est casser une chaîne de solidarité qui fonctionne au quotidien. » 

Face à cette situation, l’Unccas appelle à une mobilisation large. Soutenue par des maires, des parlementaires, des associations et des citoyens, elle réclame le retrait pur et simple de la proposition. Le message est clair : les CCAS ne sont pas un luxe administratif, mais un levier indispensable de cohésion sociale. 

À travers son réseau de plus de 4 200 CCAS/CIAS représentant 9 600 communes, l’Unccas défend une vision de l’action sociale de proximité, humaine, adaptable et enracinée dans les réalités locales. Ce modèle, loin d’être dépassé, est au contraire l’un des rares à garantir une réponse rapide et individualisée face aux détresses sociales. 

Et maintenant ? 

Enfin, dans une vision plus prospective, affaiblir les relais locaux de solidarité comme les CCAS pourrait freiner la mise en œuvre de nouveaux modèles de prise en charge. Notre livre blanc "EHPAD 2030 : vers un modèle de bien-être durable" met en lumière l’importance d’une coordination entre acteurs locaux pour améliorer l’accueil et l’autonomie des personnes âgées. 

Pour l’instant, le gouvernement n’a pas officiellement tranché. Mais les concertations se poursuivent. Dans un article de Weka, plusieurs experts s’inquiètent d’un virage idéologique : celui d’un État qui délègue sans cadre ni filet de sécurité. 

Alors que le pays affronte des défis sociaux immenses, faut-il vraiment fragiliser un outil qui, chaque jour, permet à des milliers de personnes d’être soutenues, écoutées et accompagnées ? Pour les partisans du maintien des CCAS, la réponse ne fait aucun doute : simplifier, oui, mais pas au prix de la solidarité. 

Dans les mois à venir, le sort des CCAS pourrait bien devenir un marqueur politique fort, entre technocratie réformatrice et défense d’un service public à visage humain. Une bataille discrète, mais cruciale, pour l’avenir de notre modèle social local.