(Article actualisé le 1er juillet 2023)
On ne le rappellera jamais assez,
le métier d’aide à domicile fait partie des secteurs les plus en tension, et la situation risque de devenir de plus en plus dramatique. À l’heure actuelle, des personnes parfois très âgées ayant le droit à l’APA (allocation personnalisée d’autonomie) à domicile sont sans aide pour certaines tâches du quotidien, car il n’y a pas d’auxiliaire de vie disponible.
Dans un communiqué de presse du 30 juin, les fédérations du secteur (ADEDOM, ADMR, Fédésap, FESP, FNAAFP/CSF, SYNERPA Domicile, UNA et UNCASS) indiquent qu’au seul premier trimestre de l’année,
le nombre de plans d’aide APA et PCH (prestation de compensation du handicap) non exécutés s’élève à près de 35 % faute de personnels suffisants sur le terrain, niveau jamais atteint sur le territoire.D’ici à 2030, 224 000 postes d’aides à domicile et d’aides ménagères resteront non-pourvus par les jeunes débutants, rappelait encore tout récemment la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques).
Les aides à domicile arrivent en seconde position dans le classement des métiers aux déséquilibres potentiels les plus élevés après les agents d’entretien (+328 000 postes à pourvoir).
Voir l’article d’Aladom du 9 juin 2023 : Aides à domicile et aides-ménagères : les tensions de recrutement risquent de s'aggraver selon la Dares
Pourquoi un tel désintérêt pour la profession ? Aide à domicile et aide-ménagère ont beau être des métiers où le sentiment d’utilité sociale est particulièrement élevé (91 %), ils restentmal payés, avec beaucoup de temps partiels, des conditions de travail difficiles, et des horaires de travail qui fluctuent.
Comme avec le reste des emplois dit de « deuxième ligne » (dans la pratique, les travailleurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire, du commerce, de la sécurité, de la propreté, des transports et du bâtiment) les accidents sont plus nombreux qu’ailleurs et les salaires stagnent, rappelle la chercheuse Christine Erhel (CNAM, LIRSA, CEET) dans un article pour le Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques (Liepp) de Sciences Po relayé par Le Monde (édition abonné).
Elle y reprend de travaux statistiques conduits pour dix-sept familles de métiers de seconde ligne, dans le cadre de la mission d’accompagnement des partenaires sociaux dans la démarche de la reconnaissance des travailleurs de la deuxième ligne (Christine Erhel, Sophie Moreau-Follenfant, 2021).
L’article, intitulé : "La revalorisation des emplois de "seconde ligne" : une nécessité économique et sociale" (à présent seulement disponible sur le site du Monde.fr) met en exergue trois caractéristiques de ces métiers dits de seconde ligne, dont les métiers d’aide à domicile et d’aide-ménagère sont de parfaites illustrations.
Aides à domicile et aides ménagères : des emplois mal payés, aux conditions de travail difficiles, avec des contraintes horaires
Aide à domicile, des emplois mal payés et précaires
Dans les métiers de l’aide à domicile ou des agents de propreté, les temps partiels sont particulièrement fréquents(moins de 24 heures par semaine), ce qui est une caractéristique des métiers de seconde ligne. En conséquence, les niveaux de rémunération sont très bas.
D’une façon générale, cette part des bas salaires (inférieurs à 1 246 euros net) est plus élevée dans les métiers de deuxième ligne que dans l'ensemble du secteur privé (18,0 %, contre 11,9 %).
De plus, le différentiel salarial avec les autres professions tend à s’accroître avec l’âge des salariés (de 17% pour les 25-29 ans à 37 % pour les 55-59 ans).
Plus d'accidents de travail que la moyenne pour les aides à domicile
Comme dans les autres métiers de seconde ligne, les aides à domicile connaissent plus d’accidents du travail que la moyenne, et sont soumis à de nombreuses contraintes physiques.
Travailleurs de seconde ligne, des contraintes horaires généralisées
En plus des temps partiels imposés, 19 % des travailleurs de seconde ligne travaillent plus de dix dimanches par an, et leurs horaires de travail sont moins prévisibles que pour les autres salariés.
Les aides à domicile à temps partiel se voient notamment imposer entre deux usagers des temps non-travaillés parfois beaucoup plus longs que les pauses réglementaires, et alors non-rémunérés.Elles n'ont pas le temps de rentrer chez elles, et n'ont pas vraiment d'endroit agréable où se poser gratuitement à proximité de l'usager à venir (reste leur voiture, quand c'est leur mode de transport..). Ces temps morts allongent d'autant plus l'amplitude de leurs journées hors de chez elles (NDLR).
Dans leur ouvrage "Aide à domicile, un métier en souffrance, sortir de l'impasse"(éditions de l'Atelier, mars 2023), les auteurs rappellent que la journée de travail d'une aide à domicile n'est payée qu'à hauteur des deux tiers de sa durée. Ainsi "quand on rapporte le temps décompté comme travail effectif à l'amplitude de la journée de travail, on s'aperçoit qu'il représente moins de 54%, contre 84% pour l'ensemble des salariés soulignent François Xavier Devetter, Annie Dussuet, et Emmanuelle Puissant.

Aide à domicile : beaucoup de départs à la fois précoces et pour raisons de santé
La sortie du marché du travail des métiers de seconde ligne se révèle plus compliquée, avec 26 % de personnes de 50-64 ans ni en emploi ni en retraite (une situation marquée par un fort risque de pauvreté).
Les aides à domicile font partie des vingt métiers ayant la part de sorties précoces du maché du travail la plus élevée.
Selon une note d’analyse de France Stratégie n°121, avril 2023 intitulé « Fin de carrière des seniors : quelles spécificités selon les métiers ? »,22 % des départs des aides à domicile se font pour raisons de santé.
C’est un taux élevé, qui vient après celui des OPQ de la manutention, des OPQ du second œuvre du bâtiment (31 % pour les deux), et des employés de libre-service (30 %) et des OPQ du gros œuvre du BTP (24 %).
Quelles solutions pour les aides à domicile
Comment sortir de l’impasse ? Les rapports se succèdent, et les professionnels du secteur, notamment les différentes fédérations, n’ont de cesse de faire des propositions pour revaloriser ces métiers essentiels aux débouchés assurés sur tout le territoire.
Des formations courtes sont accessibles aux adultes souhaitant faire une reconversion professionnelle dans cette branche.
De son côté, la chercheuse Christine Erhel voit plusieurs leviers qui sont :
- « du ressort du dialogue social (grilles salariales, organisation des horaires, prévention en matière de santé au travail…) ; »
- « du ressort des politiques publiques (salaire minimum, formation continue et soutien à la mobilité professionnelle, fixation de standards de qualité de l’emploi pour les marchés publics et pour l’accès à certaines subventions ou exonérations…). »
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Pour aller plus loin :
Voir le projet : « Que sait-on du travail ? » et l'article de Christine Erhel : " La revalorisation des métiers de "seconde ligne" : une nécessité économique et sociale", à présent seulement sur Le Monde.fr (abonnés).
A noter que Lemonde.fr, en collaboration avec le Liepp et les Presses de Sciences Po, diffusera sur sa chaîne Emploi la trentaine de textes qui constituent ce projet.
Voir la note d'analyse de France Stratégie d'avril 2023 : Fin de carrière des seniors : quelles spécificités selon les métiers
Voir le communiqué de presse du 30 juin des fédérations du secteur : Autonomie : les fédérations du secteur interpellent la première ministre sur la situation économique critique des services à domicile
Découvrez notre épisode de podcast sur l'importance de la valorisation de ces métiers réalisé avec A2micile.