Un nouveau souffle pour Korian
Selon l’article 176 du 22 mai 2019 de la loi Pacte qui a introduit la qualité de société à mission, Il s'agit pour une entreprise d'affirmer publiquement sa raison d'être, ainsi qu’un ou plusieurs objectifs sociaux et environnementaux qu'elle se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité. Ces éléments doivent être inscrits dans les statuts de l'entreprise et déclarés au greffe du tribunal de commerce, selon les modalités prévues par le décret n° 2020-1 du 2 janvier 2020. Plusieurs entreprises se sont déjà engagées à l'image de Danone, la Camif, Yves Rocher etc.
La décision du groupe Korian de devenir une société à mission, par la voix de son directeur financier Philippe Garin, le mercredi 23 février 2022, n’est pas sans lien avec la sortie, en janvier 2022, du livre-enquête explosif du journaliste Victor Castanet, “Les Fossoyeurs”. Ce livre d’investigation a mis en lumière la maltraitance que pouvaient subir nos aînés dans certaines des résidences Orpea, l’un des groupes leader du marché des maisons de retraite et des cliniques privées dans le monde.
Dans la foulée, le magazine télé Cash Investigation sur France 2 (présenté par la journaliste Lise Lucet), a diffusé en mars 2022, un reportage - fruit d’une enquête d’un an et demi - sur les Ehpad privés commerciaux afin de montrer de quelle façon ces derniers maximisaient les bénéfices au détriment du bien-être des résidents et des conditions de travail de leurs salariés. Le groupe Korian était au cœur du sujet.
Ces affaires très médiatisées ont eu des répercussions sur l’ensemble des Ehpad, des grands groupes plus précisément et en particulier sur Korian, l’un des principaux concurrents d’Orpea. Conséquence ? Le cours de la bourse du groupe Korian a dévissé d’un tiers de sa valeur au mois de février 2022. Premier groupe européen de soin au service des personnes âgées et fragiles, Korian est présent dans sept pays européens (Allemagne, Belgique, Espagne, France, Italie, Pays-Bas et Royaume-Uni). Les 67 000 professionnels du groupe accompagnent chaque année plus de 800 000 patients et résidents, sous de multiples formes : maisons de retraite médicalisées, établissements et services de santé, solutions d’accompagnement à domicile ou d’habitat alternatif. En sa sa qualité de leader des Ehpad en France et à l’étranger, Korian se devait de réagir. Ainsi, dans une volonté de maintenir le groupe, de tourner la page du scandale Orpea et de la crise sanitaire de Covid-19, devenir une société à mission permettrait de rassurer les résidents, leurs familles mais aussi les investisseurs.
Le
communiqué de presse du groupe Korian, du 25 avril 2023 explique que cette évolution est l’aboutissement d’une large consultation menée auprès de l’ensemble des parties prenantes. 1 500 personnes, dans les sept pays d’implantation de Korian, y ont participé directement : patients, associations de familles, représentants de salariés, communautés locales, investisseurs ESG…. Tous les collaborateurs ont été de plus consultés individuellement. En adoptant la qualité de société à mission,
Korian choisit de rendre publique et opposable sa contribution au bien commun. De plus, la proposition de loi sur le Bien vieillir, envisage de rendre obligatoire l’adoption de la qualité de société à mission par l’ensemble des entreprises ayant une activité dans le secteur du Grand Age.
Les résolutions et initiatives à venir en faveur des salariés et des résidents du groupe
Assez exhaustif et relativement transparent, le communiqué de presse précise que, Korian soumettra au vote de la prochaine Assemblée générale des actionnaires le 15 juin 2023 différentes résolutions pour acter l’adoption de la qualité de société à mission au sens de l’article L.210 10 du code du commerce. Cela se traduit par l’insertion d’une raison d’être ainsi formulée "Prendre soin de l'humanité de chacun dans les moments de fragilité", s’inspirant des 3 valeurs du groupe de confiance, d’initiative et de responsabilité ; la prise de 5 engagements structurants vis-à-vis des différentes catégories de parties prenantes : considération, équité, innovation, proximité et durabilité ; la création d’un comité de mission composé de 13 membres représentant à part égale les salariés, les conseils des parties prenantes (dont les familles des patients et résidents) existant dans chaque pays, et des personnalités qualifiées.
Le groupe compte bien déployer différentes initiatives dès les prochains mois comme : le recours systématique à un score de considération telle que perçue par les résidents, patients et leurs proches, afin de contribuer à ce que chaque personne soignée se sente pleinement prise en compte et respectée pour ce qu’elle est ; la création de fonds de solidarité au profit des collaborateurs. Parce qu’il est essentiel de prendre soin de ceux qui s’engagent chaque jour auprès des patients et résidents, Korian renforcera son soutien à ses collaborateurs qui traversent des moments de vulnérabilité en leur apportant une assistance psychologique et sociale, à travers son réseau d’assistantes sociales, dont le nombre sera doublé en France, et un support temporaire, financier ou en nature apporté par le fonds. Ce dispositif, opérationnel en France dès 2023, s’inscrit dans la continuité des actions engagées depuis plusieurs années pour lutter contre les situations de précarité et prévenir les violences faites aux femmes ; la mise en place d’une ligne d’écoute et de conseil à la disposition de toutes les personnes confrontées pour elles-mêmes ou pour un proche à un accident de la vie ou à une situation de fragilité. Cette ligne sera mise en place en France dès le 1er juillet 2023 ; la création d’une université d’entreprise permettant à chaque collaborateur de s’inscrire, s’il le souhaite, dans une trajectoire de promotion professionnelle par la formation. Cette université offrira également des cours en ligne en libre accès. Korian prend l’engagement d’être en mesure, dès 2023 en France et à terme dans tous ses pays d’implantation, d’offrir chaque année au minimum à 6 000 collaborateurs l’opportunité de suivre une formation diplômante dans ses principales filières professionnelles (de niveau IV à I) dispensée par l’université d’entreprise ou les institutions partenaires ; le renforcement de l’actionnariat salarié avec l’objectif de doubler la part du capital détenu par les collaborateurs du groupe à horizon 2026 ; la priorité donnée aux achats locaux et inclusifs afin de limiter l’impact sur l’environnement des activités du groupe et ainsi contribuer positivement au développement des communautés locales et de l'économie des territoires, et encourager l’intégration des personnes vulnérables ou en difficultés ; la réduction de l’empreinte carbone liée aux énergies consommées par le groupe afin de limiter l'impact sur le changement climatique et contribuer à l’effort européen de réduction des émissions de gaz à effet de serre. De plus, le groupe s'engage à rejoindre l'initiative SBT (Science-Based Target) d'ici à juillet 2023 et à soumettre ses objectifs de trajectoire bas-carbone d'ici à décembre 2023 ; le lancement de six projets de recherche médicale et clinique à l’échelle européenne avec des institutions académiques partenaires, portant notamment sur la prévention et le traitement de la dépression des personnes âgées, la détection précoce des troubles exécutifs et la prévention des risques de chute, ainsi que de la neuro-réadaptation post-AVC.

Quand Korian devient Clariane
Faire peau neuve passe aussi par un changement de dénomination. Le communiqué de presse précise qu’il sera proposé à l’Assemblée générale, pour marquer l’adoption de ces différents engagements communs à toutes les activités du groupe Korian, de doter la société européenne, structure de tête du groupe, d’un nom distinct, sous la dénomination de Clariane. Le groupe conservera toutefois les différentes marques expertes, sous lesquelles il opère aujourd’hui : pour les maisons de retraite médicalisées (Korian, Seniors Residencias, Berkley), pour les établissements et services de santé (Inicea, Ita, Grupo 5, Lebenswert…), pour le domicile et l’habitat alternatif (Petits-fils, Ages & Vie…).
Enfin, pour soutenir le déploiement de l’ensemble de ces transformations, le groupe annonce le lancement d’un nouveau projet d’entreprise. Ce projet retient 3 priorités, au plus près des besoins de santé des territoires, et en privilégiant une approche centrée sur les besoins du patient : l’accompagnement du virage ambulatoire, en particulier dans le réseau sanitaire, et le renforcement des liens domicile-établissement, de manière à pouvoir développer la prévention et le soutien de proximité aux proches aidants ; la poursuite du renforcement des fondamentaux métiers, notamment le développement de l’expertise médicale en gériatrie, médecine physique et de rééducation et psychiatrie, l’anticipation des besoins de recrutement et le développement de filières internes de formation permettant de couvrir au moins 50% des besoins, et l’accélération de la digitalisation pour une meilleure qualité des soins et un confort d’exercice accru pour les collaborateurs ; la construction d’un pacte de confiance durable, à travers les engagements et la gouvernance élargie mise en place dans le cadre de l’entreprise à mission.
Paroles de salariés syndiqués
Les avis sont partagés. Quelques jours après la sortie du livre “Les Fossoyeurs”, le syndicat UNSA Korian a appelé dans un communiqué (du 31 janvier 2022) à changer de paradigme : “Il est désormais indispensable de changer en profondeur notre mode de fonctionnement afin que le secteur privé ne soit plus perçu, par les médias et l’opinion publique, comme des machines à cash. C’est une question de survie pour le secteur et pour les milliers d’emplois qui en découlent.”. Le syndicat appelle Korian (avant les instances dirigeantes du groupe) à devenir une société à mission : “Nous demandons donc à la Direction générale de Korian de faire valoir tout le travail engagé sur l’éthique, la qualité et l’engagement sociétal, en s’engageant dans un processus d’entreprise à mission. Ainsi, avec toute l’exigence voulue par ce statut nous serions enfin en mesure de garantir une transparence totale.”
La CGT a quant à elle, un avis radicalement opposé. Dans un communiqué de presse diffusé le 24 février 2022, la CGT revendique un grand service public de la Santé. “Nous réfutons et combattons la marchandisation de la santé. Nous militons et revendiquons la nationalisation des groupes d’EHPAD privés lucratifs. Oui, nous affirmons que la recherche de profit n'est pas compatible avec une prise en charge de qualité des résident.e.s et de meilleures conditions de travail des salarié(e)s.”
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