Des étudiants en plus grand nombre 

Selon une enquête de France Stratégie et de la DARES (Direction de l'Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques) menée en 2022, les besoins en recrutement pour les postes d’infirmiers (mais aussi d'aides à domicile et d’aides-soignants) devraient rester importants dans les années à venir en raison des tensions pesant sur les ressources humaines en santé mais aussi du vieillissement de la population.

Ainsi, les quotas de places dans les Instituts de Formation en Soins Infirmiers (IFSI) ont régulièrement augmenté depuis 2020 (+4% en 2020 et +6% en 2021 comme en 2022). Pour rappel, afin de répondre aux difficultés de recrutement des personnels soignants à l’hôpital et dans le secteur du grand âge et de l’autonomie, les mesures annoncées lors du Ségur de la santé en 2020 prévoyaient une augmentation importante du nombre d’étudiants infirmiers et d’élèves aides-soignants à former dès la rentrée de septembre 2020 et sur les 5 prochaines années. Ainsi, dans le cadre du plan État-région, une augmentation progressive de 6 000 places en IFSI et de 6 600 places en Instituts de Formation d’Aides-Soignantes (IFAS) a été préconisée.

Ce qui préoccupe les institutions, ne n’est pas le nombre d’étudiants qui manquent à l’appel dans les IFSI car le métier d’infirmier continue toujours à susciter des vocations. D’ailleurs, François Braun, l’actuel ministre de la Santé et de la Prévention déclarait ce mercredi 10 mai au micro de la Matinale de Cnews : “c’est la profession la plus demandée sur Parcours Sup, plus de 90 000 jeunes veulent tous les ans être infirmiers”. En effet, depuis 2019, le nombre d’étudiants en première année de formation d’infirmière progresse fortement pour atteindre près de 35 500 en 2021, après être resté globalement stable dans les années 2010, autour de 31 000. Le problème majeur réside dans le fait que ces étudiants abandonnent, d’année en année, leurs études (bien) avant la validation de leur diplôme.

L’enquête menée par la DREES (Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques) de 2011 à 2021 auprès des écoles de formation aux professions de santé dite enquête “Écoles” permet de mesurer les conséquences de ces évolutions par le biais, notamment, de la collecte du nombre d’inscrites, des interruptions de scolarité sans intention de report, de diplômées et de places effectivement ouvertes dans les formations sanitaires. 

Une augmentation des abandons en cours de scolarité… surtout en première année

L’étude de la DREES souligne qu’en 2021, 10% des étudiants ont abandonné leurs études en première année de formation d’infirmière. Ils étaient trois fois moins nombreux qu'en 2011 (3%). Le taux d’abandon en deuxième et troisième année est resté également élevé : 7% en deuxième année et 4% en troisième année en 2021.

Sur l’ensemble de la scolarité de la promotion entrée en 2018, 14% des étudiants ont abandonné leurs études, soit 3 points de plus que pour la promotion 2011. On remarque que les abandons sont plus fréquents en Normandie (19%) et dans les Pays de la Loire (18%). La région la moins touchée étant la Provence-Alpes-Côte d’Azur (8%). Le taux d’abandon a augmenté dans toutes les régions entre les promotions 2011 et 2018, mais il a évolué de façon contrastée selon les régions. En effet, l’évolution a été la plus importante pour les Pays de la Loire (+7,3 points) et la Normandie (+5,4 points), et la moins importante pour la Bourgogne Franche-Comté (+0,4 point) et la Bretagne (+0,6 point). En 2021, c’est dans les Hauts-de-France que le taux d’abandon en première année est le plus élevé (14,2 %).

Les hommes en formation d’infirmière abandonnent plus fréquemment leur scolarité que les femmes. Ainsi, le taux d’abandon des hommes de la promotion 2018 atteint 19%, contre 13% pour les femmes et 14% pour l’ensemble de la promotion.

Alors que la part des femmes en formation d’infirmière progresse de 3 points de pourcentage (entre 2011 et 2021), en 2021, elles représentent 87% des personnes scolarisées. Les hommes représentent seulement 13% des étudiants en formation d’infirmière en 2021. 
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Ces autres formations aux professions de santé touchées par une hausse des abandons 

 
Pour la plupart des formations sanitaires, le taux d’abandon en première année augmente sensiblement par rapport au début des années 2010. Parmi les formations d’une durée de 3 ou 4 ans, le taux d’abandon sur toute la scolarité a doublé au cours des années 2010 pour les manipulatrices d’électroradiologie médicale et les pédicures-podologues. Il est en revanche resté stable pour les masseurs-kinésithérapeutes et les sages-femmes.

En 2021, les taux d’abandon en première année dans les formations aux professions de santé varient entre 0,2 % (préparatrices en pharmacie hospitalière) et 19% (techniciennes de laboratoire médical). Il atteint 10% pour les infirmières, 10% pour les aides-soignantes et 9% pour les manipulatrices d’électroradiologie médicale (ERM). Le taux d’abandon en première année progresse fortement par rapport au début des années 2010 pour de nombreuses formations sanitaires. Entre 2011-2013 et 2021, le taux d’abandon en première année progresse ainsi de 6 points pour les infirmières, de 5 points pour les aides-soignantes, les manipulatrices d’électroradiologie médicale et les pédicures-podologues, et de 3 points pour les ambulanciers.

Le taux d’abandon en première année pour les techniciennes de laboratoire médical est pour sa part très variable (20 % en 2018, 8 % en 2019, 5 % en 2020 et 19 % en 2021), du fait du faible nombre d’étudiantes dans les trois seules écoles de formation. Ces taux sont plus faibles dans les formations complémentaires de spécialisation des infirmières, et relativement stables entre 2011-2013 et 2021.

Les taux d’abandon par promotion sont très variables entre les différentes formations de 3 ans ou plus. Pour les promotions 2018, il est de 2% pour les masseuses-kinésithérapeutes et les psychomotriciennes, de 7% pour les sages-femmes, de 13 % pour les techniciennes de laboratoire médical, de 14 % pour les infirmières et de 15 % pour les manipulatrices d’électroradiologie médicale. Les étudiantes ergothérapeutes de la promotion 2018 sont quatre fois plus nombreuses à abandonner leurs études en cours de scolarité que celles de la promotion 2011. L’augmentation est relativement plus modérée pour les manipulatrices d’ERM et les pédicures-podologues (multiplication par deux) et les infirmières (hausse d’un quart). Pour les autres formations, les taux d’abandon sont fluctuants d’une promotion à l’autre, mais sans tendance notable à la hausse ou à la baisse. 
 

Les mesures gouvernementales prises pour endiguer le taux d’abandon

Pour inciter les étudiants-infirmiers à ne pas abandonner leurs études et soulager les infirmiers (ainsi qu’une grande partie des personnels de santé), le ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun, a annoncé le mercredi 10 mai lors de la Matinale de Cnews, “le lancement d’une grande concertation avec tous les professionnels concernés pour refonder complètement la formation d’infirmière” (avec une mise en place prévue à la rentrée 2024) et aussi “refonder le métier d’infirmier”.

Le ministre a expliqué que le taux d’abandon alarmant de 10% pendant la première année des étudiants s’explique “parce que les étudiants infirmiers ne trouvent pas dans la formation, pas dans les études, ce à quoi ils s'attendent. Il y a une discordance entre les études et la réalité du terrain”.

Quant au métier d’infirmier, François Braun souligne qu’il n’a pas été modifié depuis 2004. Le ministre déclare : “ça fait 20 ans qu’on n’a pas modifié le décret de compétence des infirmiers qui est une liste d’actes qu’un infirmier a le droit de faire. Moi ce qui m’intéresse c’est de donner des missions aux infirmiers et dans ces missions, ils travailleront main dans la main avec le médecin et c’est comme ça que le médecin pourra prendre en charge plus de patients.”

Grégory Caumes, Directeur Adjoint en charge des services internes et des relations institutionnelles à l’Ordre National des Infirmiers (ONI), se félicite de ces annonces. “Cette réforme est une demande constante de l'Ordre National des Infirmiers depuis de nombreuses années, merci à vous Monsieur le Ministre de lancer ces travaux” a écrit Grégory Caumes sur ses réseaux sociaux.

Source des informations et des données : DREES.

Découvrez le témoignage d'Emma, infirmière