Entre augmentation et limitation des salaires
C’est lundi, lors d’une visite à Alençon (dans l’Orne) que François Braun a annoncé que le salaire maximum des médecins intérimaires à l'hôpital public serait revalorisé de près de 20%. Cette annonce intervient une semaine avant l’application de la
loi santé Rist et en particulier de son
article 33,
qui prévoit
le
contrôle de la rémunération des médecins intérimaires dans les hôpitaux. Sous peine de poursuites judiciaires, les hôpitaux ne pourront plus rémunérer les médecins intérimaires au-dessus du tarif maximum. Votée en 2019, la loi Rist (du nom de la députée du parti Renaissance Stéphanie Risle) sera seulement mise en vigueur en avril 2023. Le Covid-19 ayant retardé son application.
Le gouvernement veut mettre un terme à ce qu’il qualifie "d'intérim mercenaire”, qui consiste pour une minorité de praticiens à faire monter les enchères bien au-delà des plafonds. “Lorsque des médecins exigent 1500, 2000, 2500€ pour 24 heures, cela met en péril la continuité des soins et la sécurité financière de l'établissement”, avait déclaré le 14 mars à l'Assemblée nationale le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran. Un peu plus tôt dans l’année, lors des questions d’actualité au gouvernement devant le
Sénat, le ministre de la Santé et de la Prévention tenait, quant à lui, à rappeler quelques chiffres : “Le coût de l'intérim médical pour les hôpitaux s'est élevé à 359 millions d'euros en 2021. Vous (ndlr : le ministre s’adresse à la sénatrice Annie Le Houerou) parliez de rémunérations allant jusqu'à 3000€ pour vingt-quatre heures ; sachez que cela va même jusqu'à 5000€ ! Pourtant, vous l'avez rappelé, le plafond actuel est de 1170€. Au-delà de l'aspect financier, ces dérives contribuent à détruire les équipes hospitalières et l'engagement des praticiens : deux médecins font le même travail, mais l'un est payé trois, quatre ou cinq fois plus que l'autre pour la même période !”
Pour faire passer la pilule, le gouvernement a donc décidé de
revaloriser de 20% le plafond de rémunération des médecins intérimaires exerçant dans les hôpitaux publics. Il va donc passer de 1170€ brut pour 24 heures à 1390€. Il s'agit d'une “remise à niveau par rapport aux revalorisations qui ont eu lieu pour les médecins hospitaliers” depuis 2016, date à laquelle le montant de 1170€ avait été fixé, a précisé le ministère.
Dans un
communiqué de presse du 10 mars 2023, La FHF (Fédération Hospitalière de France) estime quant à elle que la mise en application de l’article 33 de la loi Rist le 3 avril prochain est certes nécessaire pour mettre fin aux dérives de certaines pratiques, mais ne réglera pas les difficultés structurelles de l’hôpital. La loi Rist permettra de
mettre un terme aux situations de dérives de l’intérim médical que subissent les établissements de santé publics depuis de trop nombreuses années. Selon la FHF, la dérégulation des tarifs de l’intérim, qui tend à s’accélérer toujours plus, grève les budgets des hôpitaux, ébranle leurs organisations, et entraîne des inégalités de traitement préjudiciables aux praticiens hospitaliers titulaires, qui s’engagent pour l’hôpital public et assurent la continuité des services. En détériorant la coordination entre équipes, et en conséquence, en dégradant la continuité des soins, ces pratiques contribuent à décourager les professionnels en poste, et à détruire l’attractivité des hôpitaux publics.
Toutefois, la FHF tient à rappeler que les établissements publics réclament toujours que les mesures de régulation et de plafond prévues soient étendues de façon similaire aux secteurs privés associatif et commercial, qui bien que financés par le même assuré social, en sont exemptés, afin d’empêcher le risque d’une concurrence déloyale.
La crainte de voir plusieurs établissements fermer est-elle réelle ?
L'application de la loi Rist risquerait de provoquer la fermeture de services par dizaine prévient le Syndicat National des Médecins Remplaçants Hospitaliers (SNMRH).
En effet, selon l’étude menée par le SNMRH,
69 hôpitaux, soit 107 services, pourraient être concernés par des fermetures partielles dès le 3 avril et la mise en application de la loi Rist en raison du manque de personnel (urgentistes, anesthésistes, psychiatres…). Il s'agit principalement des services d’urgence, de maternité et des blocs opératoires. Les
Ehpad seraient également concernés. "Les fermetures vont avoir lieu dans une multitude d'endroits, car les intérimaires travaillent partout. Le gouvernement ne veut plus nous faire travailler à des prix corrects. Il va se rendre compte de notre importance majeure pour faire tourner les hôpitaux", déclare un médecin au
Point.
Dans une
lettre ouverte aux élus en date du 26 mars 2023, le président du SNMRH, le docteur Eric Reboli, dresse un tableau des plus sombres sur l’avenir à court terme des hôpitaux publics, des praticiens et des patients. Il écrit : “aujourd’hui ce sont des centaines de services qui sont menacés de fermeture, dont des services d’urgences, de SMUR, de SAMU, des maternités, des services de psychiatrie et nombre d’autres… Ce sont des milliers de blocs opératoires déprogrammés, alors que ceux liés au Covid n’ont pas encore été rattrapés à ce jour. Ce sont des dizaines de milliers de soignants et techniciens non soignants qui risquent de se retrouver sans travail du jour au lendemain, dans de nombreuses villes. Ce sont des millions de patients qui ne vont plus pouvoir être soignés dignement en leur imposant une perte de chance tout à fait réelle dès le 3 AVRIL !”
Eric Reboli réclame l’abrogation totale et définitive de la loi Rist et pour ce faire, il se dit prêt à engager une action plurielle pour faire plier le gouvernement à savoir : appeler à la grève l’ensemble des médecins remplaçants, inviter tous les autres syndicats à rejoindre le mouvement, déposer une contestation auprès du conseil constitutionnel, déposer une contestation auprès de la cour de justice de l’Union Européenne.

Pas de fermeture
Début avril, le ministre de la Santé François Braun, a indiqué qu'aucun hôpital ne devrait fermer mais aussi, que le plafonnement des tarifs de l’intérim médical en avril 2023 devrait permettre de refonder l'hôpital sur des bases éthiques avec des solutions locales, pour qu'aucun patient ne soit laissé sans solution :
La revalorisation de la prime de solidarité territoriale pour apaiser les tensions
Pour tenter de calmer les esprits qui s’échauffent depuis plusieurs semaines et mieux faire accepter l’article 33 de la loi Rist, François Braun a annoncé ce même lundi à Alençon, la revalorisation de la “prime de solidarité territoriale” qui rémunère les médecins hospitaliers acceptant d’aller donner un coup de main dans les hôpitaux de leur région. Il s’agit “d’un praticien en hôpital qui en plus de son travail habituel accepte d’aider un autre hôpital, en difficultés”, dans des spécialités en tension comme les urgences, la radiologie ou la pédiatrie, a précisé le ministre de la Santé.
La revalorisation de la prime sera décidée localement par les Agences Régionales de Santé (ARS). Mais le médecin hospitalier venu en renfort pourrait recevoir “jusqu’à 2200€ brut” s’il vient travailler 24 heures le week-end, et “1700€ brut” s’il vient travailler 24 heures pendant la semaine, a indiqué François Braun.
Autre source : AFP.
Certains intérimaires pouvait demander 5 000 € pour 24 heures de garde !!!
François Braun vient de confirmer l’application, dès lundi prochain, du plafonnement des rémunérations des médecins hospitaliers intérimaires, qui coûtent environ 1,5 milliard d’euros à l’hôpital public.
Le recours aux intérimaires praticiens non titulaires pour faire face à la pénurie de soignants plombe les finances des centres hospitaliers.
Avec la loi Rist, le gouvernement souhaite faire la chasse aux intérimaires mercenaires et aux rémunérations abusives.
Mais cette loi va entrainer la mort des hôpitaux de proximité en plafonnant le salaire des médecins intérimaires à 1 170 € bruts pour 24 heures de garde. Ce montant est nettement plus faible que ce qui est versé aujourd'hui aux médecins.
Mais il est impossible de trouver un médecin dans l’établissement de Nogent le Rotrou sans proposer 30 % de plus que le plafond de la loi Rist.
Avec un modèle public/privé, longtemps loué pour son efficacité, l’hôpital de Nogent-le-Rotrou « a dégagé un excédent de 100 000 € en 2022. Ceci est possible grâce aux médecins.