Pourquoi mener une étude sur l’EHPAD de demain ?
Des EHPAD en difficultés
Les EHPAD ont mauvaise presse depuis des décennies. On les accuse de pratiquer des tarifications exorbitantes, de manquer de personnel soignant formé aux problématiques des troubles des seniors dépendants, de rogner sur les dépenses (alimentaire, hygiène, nettoyage, animation…) au détriment de la santé et du bien-être des résidents. L’architecture intérieure comme extérieure des locaux des EHPAD sont également souvent critiqués. En cause ? Le manque de modernité, de gaieté, de couleurs et de chaleur humaine qui semblent s'infiltrer dans toutes les strates de ces établissements souvent perçus comme étant vieillots et inadaptés aux attentes de ses résidents.
En 2020, la crise sanitaire liée au Covid-19 n’a fait qu'accentuer les failles de ces établissements déjà sous le feu des critiques. Du jour au lendemain, le personnel médical a dû adapter ses soins aux résidents, porter des masques et prendre des mesures d’hygiène drastiques. Parallèlement à cela et malgré les mesures de protection sanitaires censées avoir été prises, plusieurs EHPAD en France ont été des foyers infectieux sévères du coronavirus, entraînant le décès de nombreuses personnes âgées. Par manque de communication, les familles étaient laissées dans le désarroi.
Enfin, en début d’année 2022, un livre enquête qui a fait grand bruit, mené par un journaliste d’investigation sur le leader mondial des EHPAD et des cliniques privées, a révélé des pratiques douteuses et pointé du doigt les dérives de ce groupement. Ces révélations n’ont pas contribué à redorer le blason des EHPAD.
Lors du 1er séminaire pour les Cadres De Santé et les Cadres Supérieures de Santé de 13 EHPAD organisé en décembre 2021, Céline Perroy Renaud a organisé un après-midi portant sur l’EHPAD de demain. L’objectif était de “Repenser l’EHPAD de demain pour mieux panser l’EHPAD d’aujourd’hui”. C’est suite aux échanges et aux réflexions qui en ont résulté que Céline Perroy Renaud a décidé de mener une étude plus approfondie sur l’EHPAD de demain en incluant les personnes directement concernées à savoir : les résidents, le personnel soignant, les encadrants, la famille et les proches.
Une étude bien cadrée et bien menée
Céline Perroy Renaud est allée chercher les sondés dans 13 EHPAD publics et leur a proposé des questionnaires dès le mois de mars 2022. Bien entendu, ils diffèrent en fonction de la catégorie (résidents, familles, acteurs du soin, encadrants). Malgré la diversité des réponses, les mêmes préoccupations reviennent pour tous à savoir : privilégier une meilleure qualité de vie en EHPAD, proposer des soins personnalisés aux résidents, oeuvrer pour une prise en charge globale de chaque patient et aussi, établir une véritable communication au sein des EHPAD.
A noter, 27% des participants sont des animateurs et des aides soignants. Les médecins et les diététiciens n’ont pas participé à l’étude.
Quelle est la vision de l’EHPAD de demain ?
Des bâtiments conviviaux
Du côté des résidents comme des familles, on réclame de la verdure, de la fonctionnalité (par exemple : un matériel et un mobilier adaptés), de l’autonomie, de l’intimité, de l'espace, du confort et de la luminosité. L’EHPAD de demain doit être un lieu chaleureux, convivial, joyeux, éloigné du monde de l'hôpital où l’accès aux personnes à mobilité réduite doit être renforcé. Les couleurs gaies, modernes, reposantes et neutres doivent ressortir des chambres et des locaux en général. L’accueil des animaux domestiques est souhaité.
Les acteurs du soin rejoignent en grande partie l’avis des résidents et des familles. Ils souhaitent que l’EHPAD de demain soit un véritable lieu de vie à taille humaine (maximum 40 à 50 résidents). Ils souhaitent également bénéficier d’une grande salle de transmission, d’une salle de soins adaptée et d’un espace détente repas. Le bien-être des résidents est primordial et celui du personnel soignant aussi pour être efficace.
De la vraie cuisine !
Les résidents plébiscitent une cuisine plus conviviale, intimiste (avec des cloisons) dans le calme avec la possibilité d’avoir le choix du menu. Une appétence pour des condiments servis en libre-service est demandée. Alors que les seniors souhaitent une cuisine française traditionnelle (avec des plats méridionaux) au détriment d’une cuisson à l’eau, les familles des résidents privilégient des menus plutôt variés et équilibrés. Bien entendu, la cuisine sera faite sur place, les produits utilisés seront locaux, gastronomiques et bio.
Organiser des animations
Pour divertir, égayer et remplir les journées des résidents, ces derniers proposent des activités à la portée de tous. Elles auront lieu tous les jours (y compris le week-end). Les animations suivantes sont souhaitées : sorties en extérieur, loto, scrabble, musique, temps de parole, boxe, partir en vacances, voler en avion, faire des activités sportives (golf, assister à des matchs), un club couture, aller au théâtre, au cinéma, faire du tricot, de la broderie, de la peinture, faire des jeux de société, participer aux fêtes calendaires et locales, aller faire les courses.
Les familles partagent elles aussi cette volonté de diversifier les animations pour le bien-être de leurs parents placés en EHPAD. Elles ont une vision un peu plus zen des animations à proposer à leurs aînés. Il s’agira de : musique, sorties en extérieur, danse, présence d’animaux, jardinage, visite de lieux cultes, venue de clowns, gymnastique, détente, relaxation, écoute de musique, visionnage de films avec commentaires, activités d’éveil des sens, lecture (évocation de l’actualité et des métiers du passé), activités manuelles, jeux de société, barbecue, goûter, jeux de société géants, accordéon, musicothérapie, chorale.
Les familles et les proches réclament aussi des activités de bien-être comme : des séances de Snoezelen, de la manucure, de la coiffure, de la beauté… Des activités intergénérationnelles sont également demandées.
Mieux assimiler les familles en EHPAD
L’étude menée par Céline Perroy Renaud révèle que 73.2% des familles ne se sentent pas impliquées dans la vie de l’EHPAD. Ce constat n’a fait que s’accentuer suite à la crise sanitaire du Covid 19. En effet, comme le souligne l’auteure de l’étude, au pic de la crise, les familles avaient l’interdiction de rendre visite à leurs aînés durant de nombreuses semaines. Par ailleurs, la communication avait été tendue pour ne pas dire rompue entre les familles (soucieuses de l’état de santé de leurs parents et déterminées à garder un lien physique avec eux).
Les familles et les proches souhaitent l’instauration de réunions à rythme régulier réunissant les équipes soignantes au même titre que la direction. La communication passera également par l’élaboration d’un bulletin d'information, un site internet le plus exhaustif et informatif possible ainsi qu’un espace numérique. Les familles expriment le souhait d’être davantage immergé dans le quotidien des EHPAD (partager des repas, participer au Conseil de la Vie Sociale - CVS, être sollicité pour un projet personnalisé…) et des acteurs du soin en les suivant pendant une journée de travail.
Vers une prise en charge des résidents plus adaptée
Les acteurs du soin pointent, en grande majorité, le manque d’effectif dans leurs rangs. Pour assurer les soins des résidents avec humanisme, patience et bienveillance, ils souhaitent être plus nombreux (soit 1 aide-soignant pour 6 résidents), être mieux formés sur le vieillissement et les troubles associés et être pluridisciplinaires.
Pour un meilleur fonctionnement des EHPAD, les professionnels soignants préconisent de développer la communication avec les résidents mais aussi la famille. Ils veulent plus d’ouverture sur l’extérieur (interventions de bénévoles, réflexologue, socio-esthéticienne, ergothérapeute…) et de la reconnaissance. Cette reconnaissance passe, entre autres, par une augmentation des salaires et de meilleures conditions de travail.
Cette étude, menée par Céline Perroy Renaud, a le mérite d’exister et de servir de base solide pour construire l’EHPAD de demain. Retrouvez l’étude complète de Céline Perroy Renaud en suivant ce lien.
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