đïž La chute dâun empire tentaculaire
FondĂ© Ă la fin des annĂ©es 1990, le groupe Avec sâĂ©tait progressivement Ă©tendu Ă travers plus dâune centaine de structures, employant prĂšs de 10 000 personnes. Ă son actif : des services dâaide Ă domicile, plusieurs hĂŽpitaux, des centres de santĂ© et des Ehpad, mais aussi des activitĂ©s hĂŽteliĂšres et immobiliĂšres.
En dĂ©cembre 2024, le Tribunal de Metz avait accordĂ© un sursis au Groupe AVEC pour redresser l'AMAPA et l'ASTL. Lâimage du « chĂąteau de cartes qui sâeffondre » revient souvent pour dĂ©crire cette dĂ©route. Depuis plusieurs annĂ©es, les filiales du groupe se retrouvaient tour Ă tour placĂ©es en redressement ou liquidation judiciaire, dans un contexte de difficultĂ©s financiĂšres croissantes et dâaccusations de prĂ©lĂšvements abusifs sur les entitĂ©s contrĂŽlĂ©es par la holding.
Le fondateur, Bernard BensaĂŻd, a Ă©tĂ© mis en examen pour dĂ©tournement de fonds publics et prise illĂ©gale dâintĂ©rĂȘts, aprĂšs plusieurs rĂ©vĂ©lations sur la gestion du groupe.
đ Amapa : 4 300 salariĂ©s dans lâattente
Parmi les structures concernĂ©es, lâAssociation mosellane dâaide aux personnes ĂągĂ©es et handicapĂ©es (Amapa) occupe une place centrale.
Acquise en 2012 par le groupe Avec, cette association emploie environ 4 300 salariĂ©s rĂ©partis sur 29 dĂ©partements, intervenant aussi bien dans lâaide Ă domicile que dans la gestion de 13 Ehpad.
PlacĂ©e en redressement judiciaire depuis plus dâun an, Amapa avait dĂ©jĂ pris ses distances avec la maison mĂšre. Cette mise Ă lâabri a probablement Ă©vitĂ© une liquidation immĂ©diate. Selon une reprĂ©sentante CFDT citĂ©e par France Bleu, deux sociĂ©tĂ©s se seraient dĂ©jĂ positionnĂ©es pour une reprise globale de lâassociation.
Une dĂ©cision sur son avenir est attendue dĂ©but 2026, Ă lâissue de la pĂ©riode de redressement. Les salariĂ©s espĂšrent quâAmapa pourra se reconstruire, libĂ©rĂ©e de la tutelle dâun groupe dĂ©sormais dĂ©criĂ©.
đ„ La clinique mutualiste de Grenoble aussi concernĂ©e
La clinique mutualiste de Grenoble, rachetée par le groupe Avec en 2020, se retrouve elle aussi dans la tourmente. La liquidation judiciaire de la holding ne remet toutefois pas en cause son fonctionnement immédiat : depuis plusieurs mois, la clinique est gérée par des administrateurs provisoires.
Les Ă©quipes mĂ©dicales assurent la continuitĂ© des soins : « Nous avons les moyens de travailler normalement », souligne Thierry Fourme, cardiologue et chef de lâinstitut cardio-vasculaire. MĂȘme constat Ă la clinique de Chartreuse Ă Voiron, Ă©galement concernĂ©e, oĂč les recrutements se poursuivent.
Pour autant, lâavenir reste incertain : quel repreneur pour ces Ă©tablissements stratĂ©giques, qui accueillent 22 000 passages aux urgences et 1 500 naissances par an ?
đŁïž Entre inquiĂ©tude et soulagement
Du cĂŽtĂ© des syndicats, la liquidation du groupe Avec est accueillie avec un mĂ©lange de soulagement et dâinquiĂ©tude. Certains se fĂ©licitent de la fin dâun « prĂ©dateur de la santĂ© », accusĂ© dâavoir « engraissĂ© son empire sur le dos du systĂšme de santĂ© français ».
Dâautres, Ă lâimage de Christophe Ferrari, prĂ©sident de la MĂ©tropole de Grenoble, appellent Ă une refondation saine du modĂšle : « Ce qui se passe aujourdâhui est une trĂšs bonne nouvelle : enfin la justice met fin Ă une pieuvre qui sâest nourrie du systĂšme de santĂ©. La clinique mutualiste nâest pas en danger de disparition. »
đź Quelle suite pour le mĂ©dico-social ?
Au-delĂ du cas dâAmapa ou de la clinique mutualiste, la liquidation du groupe Avec interroge sur la gouvernance du secteur mĂ©dico-social. La concentration des acteurs, la financiarisation croissante des services Ă la personne et la fragilitĂ© Ă©conomique des structures associatives ou mutualistes apparaissent une nouvelle fois au grand jour.
Les prochains mois seront décisifs : trouver des repreneurs solides et instaurer des modes de gestion transparents sera essentiel pour restaurer la confiance des salariés, des patients et des usagers.
La chute du groupe Avec marque la fin dâune Ăšre et ouvre une pĂ©riode dâincertitude pour des milliers de professionnels de la santĂ© et de lâaide Ă domicile. Si certains Ă©tablissements, comme Amapa ou la clinique mutualiste de Grenoble, semblent avoir les moyens de rebondir, le dĂ©fi reste immense : reconstruire sur des bases plus saines un modĂšle mĂ©dico-social durable et Ă©thique.