La rentrée en EHPAD : un moment charnière pour le bien-être des aînés 

Les vacances d’été représentent, pour de nombreux résidents, une parenthèse lumineuse. Les familles viennent plus souvent, parfois de loin, et partagent repas, promenades et activités. La rentrée, en revanche, agit comme une bascule brutale : les visites se raréfient, les appels se font plus espacés, et le sentiment d’abandon peut ressurgir. 

À cette période, les besoins psychosociaux des personnes âgées sont particulièrement intenses. « La solitude n’est pas seulement l’absence d’autrui, elle se traduit aussi par une perte de repères et de sens », rappelle un psychologue spécialisé en gérontologie. Le bien-être en EHPAD ne peut donc plus se limiter à l’aspect médical : il doit embrasser l’ensemble des dimensions de la vie quotidienne, de l’environnement physique aux interactions sociales. 

« Après l’été, nous voyons certains résidents plonger dans une forme de mélancolie. Les familles reprennent leur rythme, les visites se font plus rares, et c’est à nous de redoubler d’attention et de créativité pour maintenir le lien », confie la directrice d’un EHPAD interrogée par La Croix en septembre 2023. 

Recréer des lieux de vie, pas seulement des lieux de soins 

De nombreux établissements ont compris que l’architecture et l’aménagement jouent un rôle majeur dans la qualité de vie. L’exemple de l’EHPAD Maison de Jeanne, dans le Calvados, illustre bien cette tendance. Les équipes y parlent d’« habitants » et non de « résidents », et l’espace a été pensé comme une véritable place de village, avec ses commerces, son bistrot et ses lieux de rencontre. 

Cette évolution s’inscrit dans un mouvement plus large : Depuis quelques années déjà, les EHPAD connaissaient une transformation discrète mais bien réelle, amorçant un virage vers des établissements plus ouverts et centrés sur la qualité de vie des résidents. 

Dans d’autres structures, des cafés ou des petites boutiques éphémères s’installent directement dans les murs de l’établissement. Objectif : redonner aux personnes âgées une expérience de la vie ordinaire, avec ses rituels simples mais essentiels. Ces initiatives rompent avec l’image de la maison de retraite fermée sur elle-même et replacent le résident dans un rôle actif, loin de la passivité que redoute tant de familles au moment de l’entrée en EHPAD. 

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Maintenir le lien avec les familles : un enjeu clé 

L’un des défis majeurs reste la continuité du lien familial. Si les proches ne peuvent pas être présents au quotidien, les EHPAD ont tout intérêt à inventer des formules qui les maintiennent dans la boucle. 

Certaines structures invitent les aidants à partager les repas, à intégrer le Conseil de Vie Sociale ou à prendre part à des ateliers communs. D’autres proposent un soutien psychologique, afin d’accompagner la culpabilité ou le sentiment d’éloignement que ressentent souvent les familles après une entrée en établissement. 

« Les familles ne doivent pas être reléguées au rôle de visiteur occasionnel. Leur présence régulière, même sous des formes différentes, est un facteur clé de bien-être et d’adaptation pour la personne âgée », rappelle l’association France Alzheimer. 

Les initiatives citoyennes jouent aussi un rôle déterminant. Le dispositif 1 Lettre 1 Sourire, par exemple, permet à des jeunes de toute la France d’écrire aux résidents pour briser leur solitude. À la rentrée, ce type de projet prend encore plus de sens, en réchauffant des journées qui peuvent sinon sembler interminables. 

Plusieurs initiatives positives, recensées par FamileoPro, montrent que les EHPAD innovent déjà en matière de bien-être, en multipliant les projets autour de la culture, de la convivialité et du lien intergénérationnel. 

Le rôle des collectivités en amont 

L’accompagnement du bien-être ne commence pas seulement une fois la personne âgée installée. Certains Centres Communaux d’Action Sociale  (CCAS) proposent, dès les premiers échanges, des animations et visites pour éviter que la transition vers l’EHPAD ne soit vécue comme une rupture brutale. Cette préparation progressive contribue à maintenir un équilibre émotionnel et facilite l’adaptation au moment de la rentrée. 

Face à la crise des EHPAD, certains seniors et leurs familles explorent de nouvelles alternatives, du maintien à domicile renforcé aux habitats partagés, preuve que la question du bien-être ne se limite plus aux murs des établissements. 

Vers les EHPAD de demain

Au-delà de ces initiatives, une question plus vaste se pose : à quoi ressembleront les EHPAD en 2030 ? Le livre blanc que nous avons publié  trace des pistes ambitieuses. 

On y lit : « Les EHPAD de 2030 seront de véritables lieux de vie, axés sur le bien-être, la durabilité et la qualité de l’accompagnement. » Une vision qui dépasse la seule période de rentrée, mais qui trouve dans ce moment charnière une illustration concrète. 

Notre document met en avant plusieurs priorités : 

Autant d’axes qui résonnent directement avec l’urgence de mieux penser l’accompagnement en automne, quand le risque de solitude est le plus marqué. 

Une rentrée à transformer en tremplin 

La rentrée en EHPAD n’a pas vocation à être vécue comme une période creuse. Elle peut devenir, au contraire, une occasion de relancer la dynamique collective : nouvelles activités, redécouverte des espaces verts, implication des familles, partenariats citoyens. 

Pour que cela fonctionne, les établissements doivent sortir du cadre strictement médical pour redevenir des lieux de vie au sens plein. Les familles, elles aussi, ont un rôle à jouer, non comme simples visiteuses occasionnelles, mais comme partenaires de l’accompagnement. 

Faire de la rentrée un moment positif 

Le bien-être des résidents en EHPAD ne se décrète pas, il se construit. À l’heure où la rentrée accentue les fragilités émotionnelles, les initiatives inspirantes montrent qu’un autre modèle est possible. Boutiques, cafés, jardins, espaces sensoriels ou lettres venues de l’extérieur… chaque geste compte pour maintenir le lien et nourrir le sentiment d’appartenance. 

En mettant en avant ces bonnes pratiques, mais aussi en s’inspirant de la vision proposée par notre livre blanc EHPAD 2030, les établissements peuvent transformer cette période souvent redoutée en opportunité vers un accompagnement plus humain et plus durable. 

Parce que vieillir en EHPAD ne devrait pas rimer avec solitude, mais avec continuité de vie, chaleur humaine et projets partagés, même quand les cartables reprennent le chemin de l’école.