Natalité : la France face à une crise silencieuse
En parallèle, la mortalité infantile progresse, et les jeunes générations expriment un désintérêt croissant pour la parentalité, souvent plus par prudence que par rejet.
Les causes sont multiples : précarité économique, crise du logement, instabilité professionnelle, éco-anxiété, difficulté d’accès à la PMA, report de l’âge de la première maternité, etc. À cela s’ajoute une remontée de la mortalité néonatale, plaçant la France à la 20ᵉ place des pays européens.
"On voudrait deux enfants, mais on n’a même pas les moyens de quitter notre T2. Et aucune place en crèche à moins de 40 minutes. Alors on reporte… encore", témoigne Clémence, 30 ans, à Nantes (rapport ANM, 2025).
Loin d’être une fatalité, cette crise pourrait être inversée à condition de lever les freins structurels. L’Académie propose ainsi plusieurs leviers : création d’une prestation universelle par enfant, développement d’un droit effectif à la garde d’enfants, réforme du congé parental et priorisation de la santé infantile.
Crèches : des besoins immenses, une filière en tension
Selon une étude conjointe de la Cnaf et de France Travail (juin 2025), il manque plus de 10 000 professionnels pour répondre aux besoins des crèches existantes et en projet. Avec l’objectif de créer 100 000 nouvelles places d’accueil d’ici 2030, la tension est déjà perceptible sur le terrain : absences non remplacées, fermetures temporaires, hausse des délais d’attribution des places.
"On est en sous-effectif permanent. Certaines sections tournent à deux pros au lieu de trois, et c’est la sécurité qui trinque. On fait comme on peut, mais on est au bout", confie Laurène, auxiliaire de puériculture à Strasbourg (CNAF - France Travail, 2025).
Parmi les pistes proposées :
- La valorisation des métiers de la petite enfance,
- La formation accélérée de profils en reconversion,
- L’expérimentation de nouvelles organisations (binômes, référents parcours),
- La mise en place de plateformes de remplacements mutualisées.
Écrans et petite enfance : un enjeu de santé publique
Dans un communiqué du 1er juillet 2025, le ministère de la Santé rappelle que l’exposition précoce et excessive aux écrans nuit gravement au développement des jeunes enfants. Retards de langage, troubles de l’attention, perturbation du sommeil, isolement relationnel : les risques sont désormais bien documentés.
À partir de ces constats, la stratégie nationale 2025 mise sur une campagne de sensibilisation grand public, relayée notamment en PMI et en maternité, ainsi qu’une formation systématique des professionnels de la petite enfance. Elle s’accompagne d’une réglementation désormais renforcée dans les lieux d’accueil, avec notamment l’interdiction formelle des écrans passifs dans les structures accueillant des enfants de moins de 3 ans. L’arrêté publié début juillet officialise cette interdiction, saluée par les acteurs du secteur.
"On voit des enfants de deux ans avec des tics de l’œil ou des troubles du langage importants. Quand on creuse, c’est souvent des heures d’écran non régulées à la maison. Les parents sont dépassés, pas malveillants", explique Virginie, éducatrice de jeunes enfants à Lyon (Santé.gouv.fr, 2025).
Le ministère insiste sur la nécessité d’un accompagnement bienveillant et non culpabilisant des familles, en misant sur des relais de proximité : PMI, crèches, assistantes maternelles, etc.
Un écosystème à repenser pour soutenir les familles
Ces trois volets – natalité, garde, écrans – ne sont pas indépendants. Ils dessinent ensemble les contours d’un environnement de parentalité plus exigeant, où chaque arbitrage pèse sur les choix de vie des familles.
Pour redonner confiance aux jeunes générations et répondre aux besoins concrets, il est urgent d'investir massivement dans la petite enfance, non pas comme une simple dépense mais comme un levier stratégique de politique sociale durable. Cela passe aussi par une revalorisation réelle des métiers du soin et de l’accueil, condition essentielle pour stabiliser les équipes et garantir un accompagnement de qualité. Enfin, il faut inscrire la prévention, l’éducation, l’accompagnement et l’accès aux soins dans une politique de santé publique intégrée et cohérente.
Ce qu’il faut retenir
- La natalité est au plus bas en France, freinée par de multiples facteurs économiques et sociaux.
- Le manque de professionnels dans les crèches compromet l’ambition d’un droit effectif à la garde d’enfants.
- L’exposition précoce aux écrans est désormais reconnue comme un risque de santé publique.
- Les autorités appellent à une réponse coordonnée et structurée autour de la petite enfance.
En 2025, l’enjeu n’est pas seulement de faire plus d’enfants, mais de permettre à chaque famille d’exercer pleinement sa parentalité dans un environnement soutenant, protecteur et respectueux du développement de l’enfant.
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