Rappel : comment fonctionne le crédit d’impôt ?

Le crédit d’impôt pour les services à la personne permet aux particuliers employeurs ou aux usagers d’un prestataire agréé de bénéficier d’une réduction d’impôt à hauteur de 50 % des dépenses engagées, dans la limite de plafonds variables selon la nature des prestations. En 2025, cette aide concerne aussi bien les familles que les retraités ou les personnes en perte d’autonomie. Elle est également compatible avec l’avance immédiate, qui permet de déduire la réduction dès la facturation. 

Parmi les services couverts : 

  • Ménage et repassage
  • Jardinage et petits bricolages
  • Garde d’enfants à domicile
  • Accompagnement de personnes âgées ou handicapées
  • Livraison de repas ou de courses
  • Soutien scolaire et assistance informatique 
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Une remise en cause qui inquiète les professionnels

Comme nous l’analysions dans notre article dédié, ce projet de réforme soulève de nombreux risques. Réduire l’envergure du crédit d’impôt pourrait désorganiser toute une économie de proximité, et priver de nombreux ménages de services devenus essentiels. 

La publication du rapport de la Cour des comptes début juin a jeté un pavé dans la mare. Le gouvernement envisage un "rabot fiscal" ciblé sur certaines activités jugées moins essentielles, en particulier le jardinage, le bricolage ou la livraison de repas. Objectif affiché : réduire le coût global du dispositif, estimé à plus de 6 milliards d’euros par an. 

"On nous promettait la simplification, on découvre le démantèlement par petites touches", déplore le président de la Fédération des Services à la Personne (FESP), dans le communiqué du 11 juin. "C’est tout un écosystème qui est menacé." 

Selon la FEDESAP, plus de 100 000 emplois pourraient être fragilisés si le dispositif venait à être restreint. L’inquiétude est d’autant plus grande que les annonces sont floues, alimentant un climat d’instabilité chez les prestataires et les particuliers employeurs. 

Des impacts concrets sur les ménages

Pour de nombreux foyers, cette aide fiscale n’est pas un bonus, mais un levier indispensable pour maintenir l’équilibre familial ou vieillir chez soi. Les témoignages récoltés ces derniers jours montrent l’ampleur du malaise. 

"Grâce au crédit d’impôt, je peux faire venir une aide trois fois par semaine pour ma mère de 84 ans. Si on perd cet avantage, je devrai réduire les heures. Et ça, je ne peux pas", témoigne Chantal, salariée à temps partiel et aidante familiale, dans Le Figaro. 

"Je vis seule avec mes deux enfants. Le ménage et le soutien scolaire me permettent de tenir debout. Sans l’avance immédiate et la déduction de moitié, c’est juste pas possible pour moi", raconte Amina, infirmière à Marseille, pour RMC. 

"On fait déjà attention à chaque euro. Si même le bricolage ou le jardinage sont sortis du champ, je devrai tout faire moi-même, au risque de me blesser", confie Bernard, 72 ans, retraité en zone rurale, à Ouest-France. 

Une mesure perçue comme injuste et incohérente

Pour les fédérations comme pour les usagers, le ciblage des services dits de "confort" est une fausse bonne idée. Le jardinage permet par exemple d’éviter les chutes chez les personnes âgées ; le petit bricolage évite des réparations mal faites ; la livraison de repas lutte contre l’isolement. 

La FEDESAP rappelle aussi que les bénéficiaires ne sont pas les ultra-riches, mais souvent des ménages modestes, des familles monoparentales ou des retraités avec des revenus moyens. "On parle d’activités de proximité, non délocalisables, utiles au tissu social local", martèle-t-on dans son communiqué. 

Une réforme aux contours encore flous

Le gouvernement n’a pas encore annoncé officiellement quelles prestations seraient exclues du dispositif. Une concertation est en cours, mais la pression est forte pour faire des économies rapides. Le ministère de l’Économie a simplement rappelé que le crédit d’impôt restait en vigueur, en précisant qu’aucune décision n’était arrêtée à ce stade. 

Pour les associations d’usagers comme les syndicats professionnels, ce flou nuit à la lisibilité du dispositif. Il freine les embauches, gèle les nouveaux contrats, et dissuade les particuliers d’y avoir recours, alors même que la demande de services à domicile explose. 

Une dimension sociale à ne pas oublier

Par ailleurs, comme nous le rappelons régulièrement, la pression sur le secteur des services à la personne s’accentue : la demande pourrait bondir de 70 % d’ici 2050, en lien avec le vieillissement de la population et la montée des besoins d’accompagnement. Toute remise en cause des aides actuelles semble donc à contre-courant des enjeux démographiques à venir. 

Au-delà des questionnements fiscaux, le débat sur le crédit d’impôt touche à une question de société : comment accompagner les plus fragiles, soutenir les aidants, et préserver l’emploi de proximité ? 

Dans une analyse publiée par Alternatives Économiques, l’économiste Rachel Silvera rappelle que les services à la personne sont à 88 % féminins, souvent exercés à temps partiel, et mal rémunérés. Réduire les aides reviendrait à fragiliser encore davantage un secteur déjà précaire, sans résoudre les vrais problèmes d’efficacité budgétaire. 

"On a besoin de visibilité, pas d’austérité. Les aides à domicile ne sont pas un luxe, ce sont des soutiens de première ligne pour les personnes âgées et dépendantes", résume Nathalie, directrice d’un organisme associatif dans la Nièvre. 

Des propositions pour renforcer plutôt que raboter

D’autant que d’autres leviers existent pour améliorer l’impact du dispositif, à commencer par la montée en compétence du secteur. Nous avons consacré un article à l’enjeu de la formation professionnelle, désormais considérée comme une priorité absolue. Former les intervenants, valoriser les métiers, professionnaliser les parcours : autant de pistes qui renforcent l’efficacité du crédit d’impôt sans en restreindre l’accès. 

Plutôt que de tailler dans le dispositif, certaines voix proposent de le réorienter intelligemment : 

  • En renforçant les contrôles pour éviter les abus,
  • En adaptant les plafonds selon les revenus,
  • En rendant certaines prestations conditionnées à des situations de fragilité,
  • En soutenant davantage les zones rurales ou sous-dotées. 

La FEDESAP et la FESP ont demandé un moratoire sur toute mesure restrictive, et la mise en place d’un comité de suivi. Leur objectif : garantir la soutenabilité budgétaire du dispositif, sans casser son impact social positif. 

Ce qu’il faut retenir

Le crédit d’impôt pour les services à la personne couvre aujourd’hui 26 activités essentielles du quotidien, qui participent au bien-être, à l’autonomie et à l’équilibre familial de millions de Français. L’éventualité d’une restriction de certaines prestations, comme le jardinage ou le bricolage, suscite une vive inquiétude chez les professionnels du secteur, les particuliers employeurs et les bénéficiaires eux-mêmes. Car au-delà des arbitrages fiscaux, c’est un véritable enjeu de solidarité, d’emploi de proximité et de justice sociale qui se dessine. 

Nous avons d’ailleurs publié plusieurs guides pratiques, dont  cet article pour optimiser jusqu’à 6 000 € de réduction en 2025  ou ce décryptage des dernières mesures fiscales applicables au CESU. Car bien comprendre les règles permet aussi de mieux défendre ce dispositif, au cœur de la vie quotidienne de millions de foyers. 

En 2025, plus que jamais, le service à la personne mérite d’être considéré comme un pilier de cohésion sociale, et non comme une simple ligne comptable à réduire.