Une parole forte venue du terrain

“Bientôt, on ne saura plus où mettre les gens.” Cette phrase n’est pas lancée à la légère. Elle émane de plusieurs directeurs d’EHPAD d’Ille-et-Vilaine, interrogés parOuest-Francedans une enquête saisissante. Le ton est grave, les témoignages sincères. Ces responsables d’établissements publics, privés ou associatifs alertent sur une réalité que trop peu de gens voient : des structures à bout de souffle, incapables de répondre à la demande. 

Selon eux, il manque tout : des moyens financiers, des bras, du temps. Les conséquences ? Des lits fermés, des équipes débordées, des résidents qui attendent des places… ou qui restent chez eux dans des conditions parfois indignes. 

Des EHPAD en déficit structurel 

La crise n’est pas nouvelle, mais elle s’aggrave. En 2023, plus de 66 % des EHPAD français étaient déficitaires, contre seulement 27 % en 2020, d’après un rapport du Sénat. En cause : une explosion des coûts (notamment l’énergie, l’alimentation, les fournitures médicales), une revalorisation salariale partiellement compensée, et une augmentation insuffisante du tarif hébergement. 

Dans certains départements comme la Haute-Vienne, ce sont même 80 % des EHPAD qui sont dans le rouge. Le Monde rapportait récemment que des structures réduisent les portions alimentaires ou limitent les produits d’hygiène pour tenter de survivre financièrement. Une gestion de la misère, là où l’on devrait parler de bientraitance. 

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Recruter : mission impossible ? 

Les difficultés de recrutement ne sont pas une surprise… mais elles prennent aujourd’hui une ampleur dramatique. Turnover constant, démissions en cascade, jeunes professionnels peu attirés par le secteur… Dans les EHPAD, on parle désormais de “poste fantôme” : un CDI affiché sur le papier, mais que personne ne vient occuper. 

Le Sénat évalue à plus de 210 000 les besoins en recrutement dans le secteur médico-social d’ici 2030. Autant dire que le défi est immense. Et les conséquences déjà visibles : équipes épuisées, arrêts maladie en hausse, recours massif à l’intérim – solution de court terme mais gouffre financier sur la durée. 

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Des familles inquiètes, des aînés en attente 

Dans les services hospitaliers, dans les foyers, dans les maisons de retraite : on observe un engorgement progressif du système. Faute de places, des personnes âgées restent plus longtemps à l’hôpital qu’elles ne le devraient, parfois sans soins adaptés. D’autres attendent un accueil en EHPAD… et voient leur état se dégrader. Quant aux familles, elles vivent dans l’angoisse, entre culpabilité et sentiment d’impuissance. 

“Nous avons une trentaine de lits fermés, faute de personnel”, confie un directeur breton. Ces chiffres, rapportés par Ouest-France, ne sont pas isolés. Et chaque lit fermé, c’est potentiellement une personne âgée qui n’a pas de solution. 

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Vers un nouveau modèle ? 

Malgré la morosité ambiante, certains établissements innovent. À Guingamp, l’EHPAD de Kersalic a fait le choix d’un modèle “village” : équipes polyvalentes, espaces ouverts, vie communautaire, liberté de circulation… Résultat ? Un établissement qui attire et fidélise, aussi bien les professionnels que les résidents. Ce type de structure repense l’accompagnement des aînés, en mettant l’humain au centre. 

Mais pour que ces modèles se multiplient, il faudra plus que de la bonne volonté. Il faudra un plan ambitieux, des financements massifs, une vraie reconnaissance du secteur, et surtout, une volonté politique claire. 

Ce que demandent les professionnels 

Le message des directeurs d’EHPAD est limpide : ils ne demandent pas la lune. Ils demandent à pouvoir effectuer leur travail correctement. Accueillir dans la dignité, accompagner dans le respect, soigner dans de bonnes conditions. Ils réclament un vrai soutien des pouvoirs publics, une meilleure coordination territoriale, et des moyens humains pour ne plus avoir à choisir entre “ouvrir un service” ou “préserver ses équipes”. 

En conclusion...

Ce qui se joue dans les EHPAD aujourd’hui, ce n’est pas simplement une crise sectorielle passagère. C’est le symptôme d’un système à bout de souffle, incapable d’absorber le choc démographique dupapy-boom. Chaque jour, des milliers de Français franchissent le seuil de la retraite. D’ici 2030, un quart de la population aura plus de 65 ans. Et pourtant, nos capacités d’accueil, nos effectifs soignants, nos financements publics… tout semble figé dans le passé. 

Le risque ? Voir se creuser un véritable gouffre entre les besoins exponentiels d’une population vieillissante et les moyens réels pour y répondre. Derrière les murs des EHPAD, ce sont des milliers de familles qui cherchent des réponses, des professionnels qui craquent, et des personnes âgées qui attendent, parfois trop longtemps, une place, un soin, une main tendue. 

Alors oui, il est temps de réinventer ce modèle. D’investir dans le médico-social comme on investit dans la santé, l’éducation ou la transition écologique. D’oser penser différemment les lieux de vie, les conditions de travail, les parcours de soin. Car vieillir ne devrait jamais rimer avec abandon. 

Demain, les aînés, ce sera nous. Et ce que nous décidons aujourd’hui pour eux dessinera le visage de notre propre vieillesse. 

Envie d’aller plus loin ? 
Le passage du domicile à l’EHPAD est souvent une étape chargée d’émotions, pour les aînés comme pour leurs proches. Comment vivre au mieux cette transition ? Quels repères garder, quelles peurs dépasser ? Dans le podcastParlons peu, parlons soin, on explore l’impact émotionnel de ce changement de vie avec humanité et sans tabou. 
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