Une hausse soutenue des arrêts maladie depuis 2019
L'analyse des données de l'Assurance Maladie montre que le nombre de journées d’arrêts maladie indemnisées a fortement augmenté depuis 2019, atteignant des niveaux bien supérieurs à ceux observés avant la crise sanitaire de 2020. En 2023, bien que le nombre de journées d’arrêt ait légèrement diminué par rapport à la période de crise, les chiffres restent bien au-dessus de ceux de 2019. Cette tendance est associée à une augmentation des indemnités journalières (IJ), ce qui a conduit à des dépenses totales d'indemnisation s'élevant à 10,2 milliards d'euros en 2023.
Les arrêts maladie représentent une part prépondérante des indemnités journalières versées, avec 60 % des dépenses totales allouées à cette catégorie. En comparaison, les accidents de travail et maladies professionnelles (AT-MP) continuent de croître en nombre de jours et de montants, tandis que les dépenses pour congés maternité et d'adoption se stabilisent dans un contexte de baisse de la natalité.
Les Arrêts Maladie et le Besoin Croissant de Recrutement
La hausse des arrêts maladie, particulièrement marquée depuis 2019, a des répercussions significatives sur les entreprises et la fonction publique, notamment en matière de gestion des
ressources humaines. En effet, l'augmentation des arrêts, en particulier ceux de longue durée, génère une pression accrue sur les équipes restantes et peut entraîner des difficultés de fonctionnement, voire une baisse de la productivité. Dans certains secteurs comme la santé, l'action sociale ou la construction, où les arrêts maladie sont souvent plus longs, les absences prolongées peuvent mener à des situations de sous-effectifs, augmentant ainsi la charge de travail des employés présents.
Cette situation met en évidence un
besoin urgent de recrutement, afin de pallier l'absentéisme et de garantir la continuité des services. Le recrutement de personnel supplémentaire devient d'autant plus crucial pour alléger la pression sur les équipes en place, améliorer les conditions de travail et prévenir les risques de burn-out. Dans certains secteurs, notamment ceux de la santé et du social, déjà confrontés à des tensions de recrutement, la gestion des arrêts maladie devient un enjeu majeur pour maintenir la qualité des services offerts à la population.
Par conséquent, un renforcement des effectifs et une meilleure gestion de l’absentéisme, associée à une politique de prévention de la santé au travail, sont essentiels pour répondre à cette problématique grandissante.
Les facteurs démographiques et économiques à l’origine de la hausse
L’évolution des arrêts maladie est influencée par des facteurs économiques et démographiques. Entre 2010 et 2019, le volume d’arrêts maladie a augmenté de 2,3 % par an en moyenne, une tendance qui s’est accélérée entre 2019 et 2023 (+3,9 % par an). Cette évolution résulte de plusieurs éléments : l'augmentation de l'emploi et le vieillissement de la population active, mais aussi une hausse de la sinistralité, en particulier du taux de recours et de la durée des arrêts à âge donné.
Un autre facteur majeur est la revalorisation exceptionnelle du Smic depuis 2021 en réponse à l'inflation. Ces hausses ont surtout bénéficié aux jeunes travailleurs, dont les IJ sont moins élevées que celles des autres tranches d'âge. En effet, les moins de 25 ans reçoivent en moyenne 27 euros par jour d'indemnisation, tandis que les 25-29 ans touchent 34 euros, contre 36 à 37 euros pour le reste de la population.
L'ensemble de ces facteurs explique environ 60 % de l'évolution des indemnités journalières. La hausse de la sinistralité, quant à elle, contribue à hauteur de 40 %, avec un taux de recours et une durée des arrêts maladie en augmentation.
Des disparités notables selon l’âge, le sexe et le secteur d’activité
L'étude révèle également que la hausse des arrêts maladie concerne toutes les catégories de salariés. Toutefois, elle est particulièrement marquée chez les salariés âgés, en lien avec l’allongement de leur durée d'activité professionnelle. Depuis 2019, la tendance haussière touche aussi fortement les jeunes travailleurs, un phénomène qui s’est intensifié récemment.
Si les arrêts maladie ont augmenté aussi bien chez les hommes que chez les femmes, cette dernière catégorie connaît une croissance plus importante. Cette hausse ne peut s'expliquer par la seule participation accrue des femmes au marché du travail, dont l'augmentation reste bien plus modeste que celle de leurs arrêts maladie.
Des durées d’arrêt qui varient considérablement
Les arrêts de courte durée, de moins de huit jours, représentent près de la moitié des arrêts indemnisés, mais ne pèsent que pour 4 % des dépenses d'indemnisation. À l’inverse, les arrêts de longue durée, de plus de six mois, bien que représentant seulement 7 % des arrêts, absorbent 45 % des coûts. Les durées moyennes d’arrêt ont retrouvé en 2023 leur niveau d’avant-crise, mais restent nettement plus élevées parmi les salariés âgés.
Des différences importantes apparaissent aussi selon les secteurs d’activité. Par exemple, les arrêts maladie sont généralement plus longs dans des secteurs comme l'industrie extractive, la santé, l'action sociale, la construction et les activités immobilières.
L’Assurance Maladie ouvre de nouvelles données en open data
Pour favoriser la transparence et l’accès à l’information, l'
Assurance Maladie a mis en ligne une nouvelle rubrique d'open data. Cette section permet d’accéder à des données détaillées sur les indemnités journalières, couvrant les arrêts maladie, les accidents du travail et les congés maternité. Ces jeux de données, disponibles depuis 2009 jusqu’en 2023, offrent des séries statistiques sur le nombre d’arrêts indemnisés, les montants versés, les dépenses associées et leur répartition par tranche de durée, secteur d’activité et tranche d’âge.
Cette initiative vise à permettre à tous les acteurs du système de santé, chercheurs, journalistes, et citoyens d’avoir accès à des données fiables et actualisées pour mieux comprendre les évolutions des arrêts maladie et les facteurs qui les influencent.
L’étude de la CNAM et de la DREES révèle une tendance forte de hausse des arrêts maladie depuis 2019, accentuée par des facteurs économiques et démographiques, mais également par des évolutions liées aux pratiques de travail. Ces données permettent d’éclairer les enjeux de santé publique et de gestion des ressources humaines en France, en soulignant les disparités entre les différentes catégories de salariés et les secteurs d’activité.