Avec 599 000 infirmières en 2021, le métier d’infirmier est la profession de santé aux effectifs les plus importants, devant les aides-soignantes (424 000) et les médecins (228 000). Parmi les professions de santé, c’est aussi l’une de celles qui ont connu la plus importante hausse d’effectifs entre 2013 et 2021 (+8%), également devant les aides-soignantes (+6%) et les médecins (+5%). Toutefois, en 2021, le nombre d’infirmières est stable par rapport à 2020, après une croissance annuelle oscillant entre 1% et 2% de 2013 à 2020. Malgré la forte hausse des effectifs, les difficultés pour recruter dans cette profession ont augmenté, faisant d’elle l’un des métiers les plus en tension.
Evolution des effectifs d'infirmières : une croissance insuffisante face aux besoins
L’étude de la Drees révèle qu’entre 2013 et 2021, le nombre d'
infirmières en emploi a augmenté de 8%, pour atteindre près de
600 000 professionnelles en 2021. Cette progression a concerné aussi bien les salariées (+7%) que les libérales (+29%), avec une dynamique particulièrement marquée dans ce dernier mode d’exercice.
Toutefois, cette croissance, bien que significative, demeure insuffisante pour répondre à l’augmentation des besoins en soins, qui sont amplifiés par le vieillissement de la population et la hausse des maladies chroniques.
En 2050, les projections montrent qu’il manquerait environ 80 000 infirmières pour maintenir une couverture équivalente à celle observée en 2021, mettant en lumière un écart préoccupant entre l’offre et la demande.
A l’horizon 2050 : vers une réorganisation des modes d’exercice
Selon les projections de la Drees, le nombre d’infirmières en emploi pourrait atteindre 821 000 en 2050, soit une augmentation de 37%. Toutefois, cette croissance serait inégale selon les modes d’exercice. Les infirmières salariées, qui représentaient la majorité des effectifs en 2021, verraient leur progression limitée à 15%, avec une baisse notable de leur part dans l’hôpital public (40% en 2050 contre 47% en 2021). En revanche, les infirmières libérales connaîtraient une augmentation spectaculaire de 75%, représentant 21% des effectifs totaux en 2050. Cette évolution met en évidence une attractivité croissante pour l’exercice libéral, perçu comme plus autonome et flexible, tandis que l’hôpital public continue de faire face à des difficultés pour retenir ses infirmières sur le long terme. Enfin, l’âge moyen des infirmières, de 41 ans, resterait quasi stable entre 2021 et 2050. La part des infirmières de 60 ans ou plus augmenterait d’un point au cours de la période, comme la part de celles de moins de 25 ans (de 6% à 7%, pour chacune de ces tranches d’âge).
Cette réorganisation des modes d’exercice soulève des questions sur l’accès aux soins, en particulier dans les zones rurales où la présence d’infirmières libérales est souvent indispensable. Par ailleurs, l’essor de l’activité libérale nécessite une adaptation des politiques publiques pour garantir une répartition équitable des soins sur l’ensemble du territoire.

Les enjeux du vieillissement de la population
Le vieillissement démographique accentue les besoins en soins infirmiers. En effet,
les personnes de 60 ans et plus consomment en moyenne 20 fois plus de soins infirmiers que les moins de 35 ans. En 2021, cette tranche d’âge représentait déjà 27% de la population française. Cette proportion devrait continuer à augmenter d’ici à 2050, atteignant des niveaux inédits. Ce phénomène entraîne une demande exponentielle en soins, non seulement pour la prise en charge des maladies chroniques mais également pour le maintien à domicile, qui constitue une priorité pour de nombreuses familles et pour les politiques de santé publique.
Pour répondre à cette demande croissante,
il serait nécessaire d’augmenter les effectifs d’infirmières à un rythme supérieur à celui observé ces dernières années. À titre d’exemple, près de 32 900 nouvelles diplômées seraient requises chaque année pour combler les besoins, contre une moyenne de 25 000 entre 2013 et 2021. Cette augmentation suppose des investissements significatifs dans la
formation, mais également des mesures pour améliorer les conditions d’exercice afin de retenir les professionnels déjà en poste.
Des leviers d’action pour renforcer les effectifs
Pour faire face à ces défis, l’étude de la Drees propose diverses solutions :
1.
Augmenter les places en formation : le nombre de places dans les Instituts de Formation en Soins Infirmiers (IFSI) a déjà été relevé suite aux accords du Ségur de la santé, avec un objectif de 38 000 places d’ici 2025 (+23% par rapport aux années 2010). Cette augmentation est une première étape, mais elle devra être pérennisée pour répondre aux besoins à long terme. Une hausse supplémentaire de 14% des places permettrait d’atteindre les objectifs de recrutement fixés pour 2050.
2.
Réduire des abandons en cours de formation : le taux d’abandons en formation infirmière a doublé entre 2013 et 2022, atteignant 20% en dernière année. Cette situation représente une perte importante pour le système de santé. Diviser ce taux par deux permettrait de diplômer près de 32 200 infirmières par an, soit un volume presque suffisant pour combler les besoins identifiés. Des mesures spécifiques, comme un accompagnement renforcé des étudiants et une meilleure articulation entre formation théorique et pratique, pourraient contribuer à réduire ces abandons.
3.
Améliorer l’attractivité du métier : les conditions de travail difficiles, notamment à l’hôpital, ainsi que des salaires jugés insuffisants sont régulièrement cités comme des freins à l’attractivité de la profession. Pour enrayer la baisse de rétention des infirmières, il est essentiel de mettre en place des politiques ambitieuses : revalorisations salariales, amélioration des conditions de travail, développement de perspectives d’évolution professionnelle et reconnaissance accrue des compétences. Une attention particulière devra également être portée à la promotion des carrières hospitalières, qui souffrent d’un désamour croissant.
Source :
Etudes et résultats n°1319 - Drees - Le nombre d’infirmières augmenterait fortement d’ici à 2050, mais moins que les besoins en soins de la population vieillissante.