Le ministre démissionnaire de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini avait annoncé le mardi 14 mai de cette année que le gouvernement envisageait de supprimer les catégories A, B et C de la fonction publique dans le cadre de la réforme prévue pour cet automne. Selon lui, ces catégories actuelles empêchent la progression des agents publics. Il propose donc d'introduire davantage de leviers pour valoriser la formation et l'expérience, afin de favoriser une évolution de carrière plus fluide. Cependant, cette réforme est source de critiques et de tensions avec les syndicats, notamment en ce qui concerne la facilitation des licenciements et l’accroissement de la rémunération au mérite. Suite à la récente dissolution, cette réforme a été mise en pause le temps qu’un nouveau gouvernement soit formé. Dans l'intervalle, il est légitime de s'interroger sur la rémunération d'un groupe aussi central que les agents de la fonction publique hospitalière.
Le salaire moyen dans la fonction publique hospitalière est de 2 734€ en 2022
Selon les chiffres de la Drees, fin 2022,
1.2 million de personnes sont agents de la fonction publique hospitalière (FPH). Le volume de travail sur l’année s’élève à 1.1 million d'Équivalents Temps Plein (EQTP), répartis pour 87% dans des hôpitaux et pour 13% dans des établissements médico-sociaux. Les agents de la FPH sont fonctionnaires en grande majorité (70%), alors que 23% sont contractuels et 7% sont des personnels médicaux.
En 2022,
le salaire net moyen en Équivalents Temps Plein (EQTP) des agents de la FPHs’établit à 2 734€ par mois,
en hausse de 4.8% en euros courants par rapport à 2021. Mais,
corrigé de la forte inflation en 2022 (+ 5.2%, après +1.6% en 2021),
il se replie de 0.4% en euros constants après les fortes augmentations de 2020 (+ 5.9%) et de 2021 (+ 2.8%). Ainsi, compte tenu de l’inflation, les salaires des fonctionnaires à l’hôpital ont légèrement reculé en 2022.
L’enquête montre que la baisse du salaire net moyen est plus marquée dans l’ensemble de la fonction publique, où elle s’établit à -1.4%. La revalorisation du point d’indice de la fonction publique (
3.5% au 1er juillet 2022) et la majoration de l’indice minimum de traitement de 12 points ont limité les effets de l’inflation. Par ailleurs, l’application des accords du Ségur de la santé de juillet 2020 s’est poursuivie en 2022. Ces accords ont notamment conduit à la revalorisation des grilles indiciaires de rémunération pour le personnel des filières des services de soins et du médico-technique à partir d’octobre 2021, avec un effet pleinement effectif en 2022. Enfin, l’extension au 1er avril 2022 du Complément de Traitement Indiciaire (CTI) d’un montant de 183€ net mensuels aux professionnels de la filière socio-éducative a aussi contribué à la progression des salaires moyens.
Ces chiffres sont publiés alors que les
huit syndicats représentatifs de la fonction publique ont adressé un courrier commun au nouveau Premier ministre, Michel Barnier, le vendredi 13 septembre 2024, pour demander une augmentation "rapide" des salaires des 5.7 millions d'agents publics. Pourtant, après plus de dix ans de gel, le gouvernement avait revalorisé les rémunérations de 3.5% en 2022 et de 1.5% en 2023. Mais, ces augmentations sont considérées comme insuffisantes par les syndicats, surtout dans un contexte où l'inflation moyenne a tourné autour de 5% en 2022 et 2023. Le gouvernement sortant avait toutefois exclu toute nouvelle hausse généralisée des salaires pour les fonctionnaires en 2024.
Des salaires "en mouvement" : baisse pour les catégories B et C, hausse des contractuels, recul pour le personnel médical
Les fonctionnaires sont répartis en trois catégories. La catégorie A reste la mieux payée. D’après l’étude de la Drees,
le salaire net mensuel moyen des fonctionnaires de catégorie A, de 3 001€ en 2022, est stable en euros constants par rapport à 2021, alors que ceux des
autres catégories chutent : - 10.9% à 2 474€ pour les agents de catégorie B, - 8.5% à 2 047€ pour ceux de catégorie C. Ces évolutions très contrastées entre catégories résultent principalement de deux reclassements : celui des diététiciens, des préparateurs en pharmacie et des techniciens de laboratoire médical, de la catégorie B à la catégorie A ; celui des auxiliaires de puériculture et des
aides-soignants, de la catégorie C à la catégorie B.
L’enquête révèle aussi que le salaire net moyen des contractuels augmente alors que celui des personnels médicaux diminue. En 2022,
les contractuels, hors personnels médicaux,
perçoivent en moyenne 2 030€ net par mois en EQTP, soit 1% de plus qu’en 2021 en euros constants. Cette hausse résulte de la poursuite de l’application des accords du Ségur de la santé qui ont surtout concerné cette catégorie d’agents en 2022. A l’inverse,
le salaire moyen des personnels médicaux baisse de 1.5 % en un an, pour s’établir à 6 501€ net par mois, alors qu’il avait nettement augmenté en 2021 (+ 3.2%).

Les inégalités de salaire s’accentuent entre les statuts d’emploi et les sexes
L’étude de la Drees montre qu’en 2022, la moitié des salariés de la FPH gagnent moins de 2 350€ net par mois en Équivalent Temps Plein (ETP). Ce salaire médian augmente de 0.2% en euros constants. Et aussi, les 10% des salariés les moins bien rémunérés perçoivent moins de 1 753€ net par mois en EQTP. À l’autre extrémité de l’échelle des revenus, les 10% les mieux rémunérés gagnent plus de 3 823€, un montant en hausse de 0.4%. Les disparités salariales s’accentuent donc par rapport à 2021.
Plus encore, la hausse des disparités salariales se retrouve dans chaque grande catégorie d’agents. Les 10% des personnels médicaux les moins bien rémunérés perçoivent moins de 3 369€ net par mois en EQTP. A l’opposé, les 10% les mieux rémunérés gagnent plus de 9 633€, un montant en hausse de 1% en euros constants. Ainsi, pour les personnels médicaux, les disparités salariales augmentent par rapport à 2021. Elles augmentent aussi pour les contractuels en 2022. L’enquête souligne que les revalorisations du salaire de base ont pu être plus élevées lors des embauches ou des renouvellements de contrat liés aux métiers en tension.
Concernant les femmes, à profil identique, elles perçoivent en moyenne 4% de moins que les hommes. En 2022, le salaire net en Équivalent Temps Plein (EQTP) des femmes dans la FPH s’élève en moyenne à 2 608€ par mois, soit 18.3% de moins que celui des hommes (3 191€). Cet écart est en baisse de 1.2 point en un an, après une hausse l’année précédente (+ 0.5 point). A statut donné, les écarts salariaux entre les femmes et les hommes sont bien plus réduits, mais persistent quand même. En effet, les femmes gagnent en moyenne 1.3% de moins que les hommes parmi les fonctionnaires, 6% de moins parmi les contractuels. L’écart culmine à 13.5% au sein des personnels médicaux, les femmes étant notamment plus jeunes dans cette catégorie. Au total, à statut, âge, grade, catégorie hiérarchique et type d’employeur identiques, les femmes perçoivent 4% de moins que les hommes, un écart stable par rapport à 2021… Mais un écart quand même.
Le salaire net moyen des salariés en place augmente de 2.4%
Selon la Drees, les salariés en place, c’est-à-dire présents du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2022 chez le même employeur et avec la même quotité de temps de travail pendant les deux années, représentent près des deux tiers du volume de travail de la FPH (Fonction Publique Hospitalière) en 2021. Les fonctionnaires - particulièrement les agents de catégories B et C -, les hommes et les agents en seconde partie de carrière figurent parmi les salariés de la FPH restant le plus souvent en place. Le salaire net moyen des salariés présents deux années consécutives, appelé Rémunération Moyenne des Personnes en Place (RMPP), augmente de 2.4% en 2022 en euros constants.
Cette hausse reflète les effets positifs des gains d’ancienneté, des progressions de carrière et des mesures de revalorisation salariale. Pour les fonctionnaires, la RMPP augmente de 2.1%. Elle s’accroît de 3.8% pour les agents de catégorie A, de 0.6% pour la catégorie B et de 1.2% pour la catégorie C. Elle augmente de 4% pour les contractuels et de 2.5% pour les personnels médicaux. Outre les personnes en place, 20% des salariés de 2022 sont "entrés" dans la FPH en 2021 ou 2022 et 20% des salariés de 2021 sont "sortis" en 2021 ou en 2022. Enfin, 13.4% des salariés sont désignés comme "fluctuants" : soit ils n’ont travaillé qu’une partie de 2021 et une partie de 2022, soit ils ont changé d’employeur ou de quotité de temps de travail au cours de ces deux années. Les femmes, les plus jeunes, les contractuels, en particulier les bénéficiaires de contrats aidés, sont surreprésentés dans ce groupe.
Il convient aussi de noter, que la contribution de l’écart de salaire moyen entre les “entrants” et les “sortants” à l’évolution du salaire moyen de l’ensemble pèse fortement (- 1.7 point). En effet, selon l’étude menée par la Drees, les jeunes générations entrantes sont moins bien rémunérées que les plus âgées sortantes. Et, les variations d’effectifs de ces groupes ont un effet neutre sur l’évolution du salaire net moyen.