Une décision de justice “rassurante” pour les parties concernées
Après des semaines d’attente et d'inquiétude, la plupart des résidents du groupe d’Ehpad privé Medicharme et leurs familles peuvent enfin souffler. En effet, en fin de semaine dernière, le tribunal de commerce de Nanterre a validé les offres de reprise de 42 des 43 établissements du groupe Medicharme qui avait été placé en liquidation judiciaire fin février. Les repreneurs de ces sites “seront en charge de l’exploitation dès aujourd’hui”, a annoncé Medicharme dans un communiqué de presse, le vendredi 5 avril dernier. Et de poursuivre : “Nous comprenons l’inquiétude des familles face à cette situation, mais sommes cependant rassurés de savoir que chaque résident sera accueilli dans un établissement de la région, adapté à son besoin.”
Créé en 2015, Medicharme est le neuvième acteur du secteur privé lucratif en France, employant 1280 salariés. Le groupe a engrangé 155 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022. Parmi les 43 établissements que compte Medicharme : il y a 34 Ehpad, 7 résidences services seniors, une maison de retraite non médicalisée (Ehpa) et un Foyer d’Accueil Médicalisé (FAM) – pour un total d’environ 2000 lits - le tout, réparti dans six régions de France.
C’est le consortium formé par les acteurs privés du secteur :
Domidep, Jestia, Sedna et Edenis qui sont les repreneurs. Dans le détail, 17 Ehpad et 5 RSS sont repris par Domidep, 8 Ehpad et 2 RSS par Jestia, 5 Ehpad par Sedna et 1 Ehpad par Edenis. Ces sociétés ont pris les rênes des établissements concernés dès le vendredi 6 avril. Deux sites ardéchois (un Ehpad et un FAM) seront repris par l’ADAPEI (Association Départementale d’Amis et de Parents d’Enfants Inadaptés). Pour un dernier établissement, la décision sera prise le 11 avril, avec une jouissance le 12.
“Déplacer des résidents, c’est pire que tout. Donc pouvoir les maintenir dans leur lieu de vie et avoir réussi à préserver un maximum d’emplois, c’est un soulagement”, a indiqué auprès de l’AFP la présidente du groupe, Delphine Mainguy. Seul l'Ehpad “les Jardins d’Aiffres”, dans les Deux-Sèvres, qui compte 36 salariés, n’a pas trouvé preneur. Les trente résidents seront accueillis dans un établissement de la région en fonction de leurs besoins, selon la présidence du groupe. “J’ai dans le même temps des pensées particulièrement émues pour les salariés qui vont être licenciés économiquement” explique Delphine Mainguy, évoquant un chiffre de 80 personnes sur un effectif total de 1280. Car, outre les employés des jardins d’Aiffres, une partie de ceux du siège de Medicharme, seront licenciés.
Dans le même communiqué de presse du 5 avril, la direction a tenu à adresser un message à l'ensemble de ses salariés : “Medicharme souhaite le meilleur aux équipes qui, sur le terrain, continueront à faire vivre leurs établissements, à accompagner les résidents avec professionnalisme.”
Le groupe a remercié “les repreneurs qui se sont tous engagés pour pérenniser l’activité dans le respect des valeurs de notre métier.”
Les difficultés financières au coeur de la liquidation judiciaire
Médicharme était endetté à hauteur de 150 millions d’euros. Détenu depuis 2018 par le fonds d'investissement anglais G-Square et non coté en Bourse,
Medicharme a dû faire face à une situation financière dégradée en raison du faible taux d'occupation de ses établissements, dans un contexte d'inflation et de hausse des coûts (énergie - notamment, alimentation, revalorisations salariales…). La pandémie de Covid 19 mais aussi le
scandale Orpea ont entraîné une crise de confiance de la part des Français envers les maisons de retraite. Ces événements successifs ont précipité le groupe vers le fond. C’est une situation qui touche toutefois de très nombreux Etablissements d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes, qu'ils soient publics, associatifs ou privés.
Medicharme est le premier groupe à avoir été placé en liquidation judiciaire. Le site en ligne
Capital précise que la demande de placement en liquidation judiciaire fait suite à l'ouverture en novembre 2023 d'une procédure confidentielle de conciliation, associée à un dispositif de “prépack cession”, qui permet d'accélérer le calendrier en arrivant devant la justice avec déjà plusieurs projets de reprise. Les repreneurs ont donc pu racheter les établissements pour un prix symbolique et n'ont pas eu à éponger les dettes.
Par ailleurs, Médicharme fait l'objet, depuis l’été 2023, de deux enquêtes administratives. L'Inspection Générale des Finances (IGF) et celle des Affaires sociales (Igas) ont été chargées d'examiner, entre autres, ses "pratiques commerciales et financières", ses "pratiques managériales" ainsi que le "temps de présence effectif des personnels" auprès des résidents.
"Ces enquêtes sont clôturées. Le rapport définitif est finalisé. Je l'ai en ma possession mais je ne sais pas si le ministère compte le rendre public", a déclaré Delphine Mainguy pour le site
Gerontonews, qui dit ne pas craindre d'éventuelles poursuites. "Ce rapport est une analyse de situation et cherche aussi à identifier les enjeux majeurs du secteur. En réalité, il va bien au-delà de Medicharme". a tenu à préciser Delphine Mainguy.

La faillite de Medicharme : le premier d’une longue liste ?
La défaillance du groupe Medicharme est une première en France. C’est un séisme pour le secteur des
Ehpad, qu’ils soient privés, publics ou associatifs. Cela fait des années qu’ils alertent sur des
difficultés financières grandissantes et inextricables (pour certains).
Dans un communiqué de presse en date du 4 mars 2024, le Synerpa (Syndicat national des établissements et résidences pour personnes âgées) a exprimé sa profonde solidarité envers les salariés de Medicharme, mais aussi les résidents et les familles, tout en alertant (une nouvelle fois) sur la situation préoccupante des établissements : “la défaillance de ce groupe doit nous alerter sur les immenses difficultés économiques et sociales rencontrées par les établissements depuis plus de deux ans : inflation record, hausse des taux d’intérêt, taux d’occupation, évolutions insuffisantes des prix administrés, pénuries de personnels, etc. Le Synerpa alerte à nouveau sur les difficultés de trésorerie insoutenables rencontrées par l’ensemble du secteur accroissant le risque de défaillance de certains acteurs. Dans ce contexte, la confédération appelle à augmenter massivement et dès à présent les ressources des acteurs privés du grand âge dans le cadre de la campagne budgétaire qui s’ouvre.”
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