Lorsque l'on est atteint de la maladie d'Alzheimer, et que les troubles cognitifs deviennent trop compliqués à gérer au quotidien pour les proches, l'Ehpad est souvent envisagé comme l'étape suivante. Tout du moins en France. Car en Allemagne, une autre solution est beaucoup plus développée : celle des colocations Alzheimer. Il en existe déjà 3 700 outre-Rhin, alors qu'en France, elles sont à peine 70. Confidentielles et méconnues du grand public, elles méritent pourtant d'être mieux connues.
L'étude « Vivre dans une colocation Alzheimer », commandée par la fondation Médéric Alzheimer, s'est penchée sur six d'entre elles :
-L’ASSAP/CLARPA (Morbihan)
- Les Petits Frères des Pauvres (Oise)
- La Maison des Cultures (Seine et Marne)
- La Maison des Sages de Buc (Yvelines)
- Ama Vitae (Nord)
-Familles Solidaires (Haut-Rhin).

Non pas dans le but de les comparer, mais « d’identifier les bonnes pratiques développées, les choix effectués, les difficultés ou les contraintes rencontrées, les leviers mobilisés... » souligne le sociologue Franck Guichet, directeur associé du bureau d'études émiCité, qui a réalisé l'étude.

Car de plus en plus de personnes s'y intéressent, tant les familles à la recherche de solutions d'aide aux seniors que les professionnels, les pouvoirs publics, et l'ensemble des acteurs concernés par les troubles neurocognitifs.


Colocation Alzheimer : un domicile de huit habitants en moyenne

Une colocation Alzheimer peut être soit une maison, soit un appartement. Elle est toujours composée d’espaces communs et de pièces privées. En moyenne, huit habitants y vivent, accompagnés en plus d'aides humaines 24h/24h (une auxiliaire de vie et une personne présente la nuit). On y trouve aussi, une personne en charge de la coordination et de l'animation de la vie partagée, et des professionnels de santé, et des intervenants (musicothérapie, gym douce...) qui passent en journée. Aux yeux de la loi, une colocation Alzheimer est un domcile, et non un établissement médico-social.

Les coûts de la vie quotidienne sont mutualisés (loyer, charges, courses...), ainsi que ceux de l'auxiliaire de vie. Les colocataires bénéficient aussi d’une nouvelle allocation : l’aide à la vie partagée (AVP), une aide individuelle destinée aux personnes en situation de handicap et aux personnes âgées de plus de 65 ans ayant fait le choix de vivre dans un habitat inclusif.

Comme pour l’Ehpad, le reste à charge est important.Une fois ces ressources déduites au coût de la colocation, le reste à charge mensuel moyen est de 2550 euros par habitant (toute colocation confondue).

Voir aussi l'article d'Aladom sur l'habitat inclusif accompagné, partagé et inséré dans la vie locale : Projets d'habitat partagé : une nouvelle plateforme pour avoir toutes les informations

Colocation Alzheimer : quels  bienfaits pour les habitants

Chaque habitant participe à la vie collective selon ses envies, ses centres d’intérêt, ses capacités, même lorsqu'elles diminuent, sans aucune exigence de réussite, et sans mettre en échec les personnes. La réalisation de ces tâches est avant tout un support à l’échange, au moment partagé.
Vivre en groupe, devoir respecter les règles de la politesse et la mobilisation du savoir-être stimule aussi la personne ayant des troubles cognitifs, qui garde alors le souci de soi. « Le risque qu’elle se néglige est beaucoup moins fort que si elle était seule à son domicile », souligne l'étude.

Besoin d'aide à domicile ?

Auxiliaires de vie : de meilleures conditions de travail qu'à domicile ou en Ehpad

Les auxiliaires de vie intervenant en colocation Alzheimer ont des conditions de travail très différentes de celles des auxiliaires de vie à domicile, qui, au sein de la même journée, vont d'une domicile à l'autre pour des périodes courtes (souvent d'une heure à quelques heures).
En colocation Alzheimer, elles passent toute la journée sur place avec eux, alternant « moments de soins, moments consacrés à la préparation des repas, à l’entretien de la maison ou à des activités (promenade, chant, danse, discussion, jardinage, etc.). Une polyvalence et une liberté qui les valorise et qui leur laisse de l'autonomie. De ce fait, il apparaît que les auxiliaires de vie qui interviennent dans les colocations Alzheimer «se sentent davantage reconnues dans leur travail que lorsqu’elles intervenaient à domicile », y compris par les aidants, qui participent parfois aux tâches du quotidien à leurs côtés.
« Ces temps informels d’échanges sont aussi des temps d’écoute et de conseils des auxiliaires auprès des aidants. Elles transmettent ainsi leurs expériences dans l’attention et l’accompagnement qu’elles apportent aux colocataires. »
Contrairement à l’emploi dans les services d’aide et de soin à domicile (SAAD, SSIAD), les colocations ne connaissent qu’un très faible turnover de leurs personnels.
Aladom.fr, le site référent de la mise en relation dans les services à la personne, propose actuellement des offres d'emploi d'auxiliaire de vie en habitat partagé Alzheimer

Colocation Alzheimer : un rôle important pour les familles

 Les familles sont invitées à participer à la gestion et au fonctionnement de la vie quotidienne (animations, sorties, bricolage, repas …), en étant présentes régulièrement. Il leur arrive aussi, quand elles viennent, de s'occuper d'un autre habitant que leur parent.

Par ailleurs, c'est à elles de coordonner le parcours de soin de leur proche car les colocations n’assurent pas le suivi médical des habitants. « C'est pourquoi l'absence de famille ou l’éloignement de celle-ci peut être un frein à l’entrée d’un proche dans une colocation. »
« Leur implication est essentielle et importante », soulignent les auteurs de l'étude.

Fondation Médéric Alzheimer : bientôt une nouvelle étude sur toutes les colocations Alzheimer en France

Pour élargir ses connaissances sur les colocations Alzheimer, la Fondation Médéric Alzheimer, au travers de son Observatoire, a lancé début 2024, une étude quantitative auprès de toutes les colocations Alzheimer en France. Les résultats sont attendus à la fin du 1er trimestre 2024.

Pour aller plus loin :

Voir l'étude : Vivre dans une colocation Alzheimer : toute une communauté pour prendre soin

Voir la vidéo : Découvrir une colocation Alzheimer