Le champ d’inspection des ARS
Les ARS (Agences Régionales de Santé) ont en charge le contrôle de tous les aspects liés au soin.
Le champ d’intervention des inspecteurs est défini par le code de la santé publique. Pour ce qui concerne un établissement sanitaire ou médico-social, cela regroupe : l’organisation et le fonctionnement général de la structure ou de l’établissement, le droit des usagers, la conformité des équipements, l’organisation des soins et la prise en charge médicale, le respect des bonnes pratiques professionnelles, les éléments d’environnement ayant un impact sur la santé (qualité de l’eaux et de l’air, déchets, hygiène…), l’habitat et la qualité de vie, la bonne mise en place d’animations et de liens sociaux, la prévention de la maltraitance, la gestion des risques.
Qui peut saisir l’ARS ?
Les signalements et les inspections inopinées
Lors de difficultés rencontrées au sein d’un établissement, les résidents ou leurs proches peuvent transmettre une réclamation aux autorités de tutelle, et les personnels leur adresser un signalement. Les établissements sont par ailleurs obligés d’adresser à l’ARS et / ou au Conseil départemental un signalement en cas d’événement grave. Chaque réclamation et signalement reçu par l’ARS est pris en compte et instruit par ses équipes, pour assurer un premier niveau de réponse et dans un grand nombre de cas, trouver des solutions quand il s’agit de difficultés individuelles.
Des explications sont ainsi demandées à l’établissement, afin d’évaluer s’il y a eu un manquement dans la prise en charge, déterminer si des mesures ont été mises en place par l’établissement pour pallier aux problèmes signalés, et le cas échéant, demander à l’établissement de remédier aux éventuels dysfonctionnements relevés lors de l’instruction.
L’inspection n’est donc pas le premier ou le seul moyen de contrôle des établissements. Les inspections non programmées et inopinées sont ciblées sur des situations d’une gravité particulière, par exemple un risque important et immédiat pour les patients. Elles visent à objectiver les griefs portés par le signalant, et s’ils sont objectivés, les mesures éventuellement mises en place pour remédier aux dysfonctionnements.
D’autres inspections peuvent être décidées par l’ARS dans le cadre d’un programme annuel, indépendamment des signalements et selon les objectifs nationaux ou les priorités propres à chaque région.
Les inspections annoncées
Les inspections annoncées sont plus adaptées aux situations portant sur des questions d’organisation et demandant de rassembler des documents particuliers ou en grand nombre (comme la prise en charge médicamenteuse) alors que les inspections inopinées sont plus adaptées aux situations de soupçons d’un défaut grave de prise en charge (matériel inadapté, ressources humaines manquantes…).
L’objectif d’une inspection est double : il s’agit de constater un dysfonctionnement, un écart avec les bonnes pratiques, un problème, et de recommander ou prescrire des solutions pour y remédier.
L’ARS s’inscrit donc autant dans une logique de contrôle que d’accompagnement, avec pour objectif prioritaire de favoriser la meilleure prise en charge possible, au bénéfice de l’usager. L’ARS intervient à la fois sur un volet répressif, notamment quand la sécurité est mise en cause, et dans une optique d’amélioration de la qualité du service rendu.
Quelles sont les sanctions qui peuvent être infligées ?
Le déroulement d’une inspection
Les inspections menées par l’ARS dans les
Ehpad sont réalisées par des inspecteurs, médecins, infirmiers, ou pharmaciens, juridiquement compétents pour les réaliser. Elles sont conduites par équipes de 2 personnes et jusqu’à 4 personnes pour les dossiers les plus complexes nécessitant de nombreux entretiens à réaliser ou documents à analyser sur place.
L’inspection d’un établissement comprend en général les étapes suivantes :
- Une visite des locaux afin de vérifier notamment les conditions de sécurité et l’hygiène générale ;
- L’étude de documents, soit sur place, soit recueillis et analysés à l’Agence dans un second temps ;
- Des entretiens avec la direction et des personnels afin de comprendre le fonctionnement et l’organisation de l’établissement, mais aussi le cas échéant d’objectiver d’éventuels griefs rapportés ;
- La possible analyse de dossiers médicaux par un médecin inspecteur de l’ARS lorsque cela est nécessaire.
Programmées ou non, la plupart des inspections concernent des situations sans risque immédiat pour les usagers. La mission établit à l’issue de son contrôle, un rapport qui indique les constats réalisés et propose des mesures d’amélioration. Ce rapport est assorti de mesures qui peuvent comporter soit des recommandations, dont la mise en œuvre est facultative, soit des prescriptions, qui ont un caractère obligatoire.
La procédure est contradictoire : un délai, allant de quelques jours à quelques semaines selon le degré d’urgence, est donné à l’établissement pour répondre au rapport. Souvent, l’établissement corrige immédiatement certaines de ses pratiques. Au-delà, il doit présenter un plan d’actions, assorti d’un calendrier précis, et qui donne lieu à des points d’avancement réguliers avec l’ARS.
Dans une situation d’une gravité particulière (mise en danger des usagers), la lettre de décision prend la forme d’une injonction, et donne alors automatiquement lieu à une inspection de vérification.
Si les prescriptions ou injonctions ne sont pas suivies d’effet, l’ARS peut prononcer une suspension immédiate d’activité, à l’encontre d’un ou plusieurs praticiens, ou de la totalité de l’établissement – donnant généralement lieu à une mise sous administration provisoire, afin d’assurer la continuité de service dans l’intérêt des usagers.
Les sanctions possibles
En dehors des recommandations et des prescriptions, des mesures de police administrative peuvent être prononcées comme : des injonctions à remédier à des risques liés à la prise en charge, des injonctions de remédier à un déséquilibre financier, une astreinte journalière, une interdiction de gérer toute nouvelle autorisation, une sanction financière, une administration provisoire par un autre gestionnaire, une suspension voire une cessation d’activité (qui demande de réorienter les personnes accueillies vers d’autres structures similaires).
Des suites de nature judiciaire, notamment par le signalement (sans délai) au Procureur de la République de tout fait constaté lors du contrôle susceptible de constituer un délit ou un crime (art. 40 du code de procédure pénale).
Outre sa mission de contrôle et d’inspection, l’ARS intervient au quotidien pour accompagner les Ehpad dans l’amélioration de la prise en charge médicale, des conditions de vie et de travail.
Des contrôles vraiment efficaces ?
Un
rapport d’information déposé au sénat le 12 juillet 2022 soulignait, qu’au regard du nombre d'établissements installés sur l'ensemble du territoire (plus de 7 500 Ehpad),
les contrôles restent encore limités. En effet, les moyens humains et financiers déployés pour l’inspection de ces établissements restent très en-deçà. “La capacité de contrôler plus d'établissements chaque année renvoie à la question des moyens dévolus au contrôle, notamment dans les ARS. Ces dernières disposeraient de 230 ETP (Équivalent Temps Plein) environ hors santé-environnement, pour assurer ces contrôles ce qui paraît faible au regard du champ extrêmement large à contrôler. Ces chiffres peuvent expliquer une réalité pointée par la Cour des comptes : un Ehpad est contrôlé tous les 20 ou 30 ans. Ils illustrent le fait que le contrôle n'était pas hissé au rang de priorité.”
Courant 2022,
le gouvernement a donc décidé d’agir pour faire des contrôles des Ehpad l’une de ses priorités. La
publication du livre-enquête "Les Fossoyeurs" de Victor Castanet, qui dénonçait un système de maltraitance organisé des aînés ainsi qu’un manque de transparence des mouvements financiers des établissements du groupe d’Ehpad privés Orpea, n’est pas étrangère aux dernières mesures gouvernementales prises.
Sources principales :
ARS Ile-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes.